Le château de Montfort-sur-Risle est un château situé sur la commune de Montfort-sur-Risle, dans l’Eure. À l’état de ruines, il n’en reste que des vestiges. Implanté sur un éperon rocheux dominant le bourg de Montfort (Mons fortis = le mont fortifié) et la vallée de la Risle à près de 120 mètres d’altitude, le château forme un vaste ensemble d’une profondeur de 280 mètres et d’une largeur de 165 mètres. D’une superficie totale de 4,6 hectares, le site représente un emplacement particulièrement avantageux lui permettant de  contrôler les voies terrestres menant de Pont-Audemer à Brionne et de Lieurey à Montfort. En outre, l’emplacement stratégique permet de prévenir tout danger en provenance du trafic fluvial et privilégie le contrôle de l’un des rares points de franchissement de la Risle aux 11e et 12e.

D’origine vraisemblablement gallo romaine, puis franque, cette hypothèse est partiellement vérifiée par les nombreux morceaux de tuiles à rebords servant de blocaille dans les pans de murs et par les textes attestant la présence de Louis de Guiry qui fut fait prisonnier et conduit dans le château de Montfort-sur-Risle au 9e siècle.

Thurstin de Bastembourg, (fils supposé de d’Anslech de Bricquebec, possède les terres de Montfort) issu d’un lignage scandinave, est seigneur de Pont-Authou. Vers 980, il reçoit le domaine de Montfort. Portant le titre de vicomte, l’origine de son nom provenait du lieu dit de Bassebourg situé sur le canton de Brucourt dans le Pays d’Auge dont il était originaire. Il meurt avant 1027. Il est la souche de la famille Bertrand par son fils Guillaume et de la maison de Montfort-sur-Risle par son autre fils Hugues le Barbu.

Hugues Ier de Montfort construisit l’édifice dans la première moitié du 11e siècle, tout au moins l’enceinte de pierre dans sa configuration de base et vraisemblablement la tour porte subsistante.

Hugues à la Barbe prit une part active dans les troubles qui désolèrent la Normandie, après la mort du duc Robert, arrivée en 1035. Au milieu des sanglants désordres de cette époque, la guerre s’éleva entre lui et Walkelin de Ferrières. En vain les plus hauts personnages tentèrent de s’interposer entre ces deux chevaliers également braves et puissants : ils en vinrent aux mains en 1039 à Plasnes près de Bernay.Le combat fut si acharné, que tous les deux restèrent sans vie sur le champ de bataille, avec beaucoup de leurs amis.

Hugues II qui lui succéda était dévoué au duc Guillaume dont il était le connétable. Il l’accompagna dans la plupart de ses expéditions guerrières. En 1054, aux côtés de Guillaume, il remporte sur les Français l’éclatante victoire de Mortemer. Hugues II accompagne le duc Guillaume à Hastings en 1066 et se voit gratifié de 114 manoirs répartis sur l’Angleterre. Il reçoit également l’honneur d’Haugley, et se voit confier avec Odon de Bayeux la gestion de l’ensemble du comté de Kent.

Sur la fin de ses jours, Hugues II embrassa la vie religieuse dans l’abbaye du Bec, où il mourut. De son premier mariage avec une fille de Richard de Beaufou, était née une fille qui épousa Gislebert de Gand ; et, d’une deuxième femme, il avait eu Hugues III et Robert de Montfort qui recevront respectivement les terres anglaises et les terres normandes.

Hugues III ne jouit pas longtemps du domaine de son père. Trouvant la mort en terre sainte lors des croisades, les possessions anglaises échouèrent à Robert Ier excepté l’honneur d’Haugley qui sera la base de forts désaccords entre le futur roi d’Angleterre Henri Ier et les Montfort.

Robert Ier, connétable héréditaire, s’illustra aux côtés de Guillaume le Roux, roi d’Angleterre. Sur son ordre, il s’empare de la tour du Mans et s’illustre brillamment à travers d’autres faits d’armes, mais en 1102, il abandonne le duc de Normandie au siège de Vignat et combat contre lui en 1106 à la bataille de Tinchebray. En l’absence de postérité, le domaine de Montfort revint à son neveu qui prit le nom de Hugues IV.

Hugues IV de Montfort améliora le château dans la première moitié du 12e siècle, ceci correspond vraisemblablement à la période de la conspiration de La Croix-Saint-Leufroy à laquelle avait participé le sire de Montfort. La construction du donjon et des tours d’angles et de flanquement correspond sans doute à cette période.

La conspiration de la Croix-Saint-Leufroy en 1122 visait à élever au pouvoir Guillaume Cliton au détriment du roi Henri Ier, il en résulta un fort ressentiment du roi Henri qui assiégea le château en 1124.

Le château fut remis entre les mains de Galéran IV de Meulan, beau frère de Hugues de Montfort, qui fut prisonnier du roi jusqu’en 1135.

Pendant 36 ans, Galéran occupa les lieux et fit réparer le château.

Cependant Robert II, fils aîné de Hugues IV repris à Galéran en 1153 le château que ce dernier s’était accaparé. Robert II possédait les trois honneurs de Coquainvilliers, Orbec et Montfort, 21 chevaliers relevaient de lui pour l’honneur de Montfort, 23 pour l’honneur de Coquainvillers, et 11 pour l’honneur d’Orbec, soit un total de 55 chevaliers ce qui est considérable à l’époque. Robert II mourut en 1179 et c’est Hugues V qui hérita du titre de sire de Montfort. Il est assez peu question de lui dans l’histoire sauf ce que rapportent les Rôles Normands ainsi que de sa participation au paiement de la rançon de Richard Cœur de Lion en 1195. À la suite de la prise de Château Gaillard par le roi de France, le château de Montfort s’inscrivit dans la seconde ligne de défense du duché et devint ainsi une pièce maîtresse.

Hugues V, fidèle au duc de Normandie Jean sans Terre reçut de nouvelles faveurs. Mais en 1203, Hugues V disparaît des textes et il est fort probable qu’il perdit la vie lors d’un combat. Le château échut à Hugues de Gournay, qui abandonna Jean sans Terre en livrant Montfort aux troupes de Philippe Auguste. De par son importance stratégique, la forteresse fut reprise par le roi d’Angleterre qui la détruisit partiellement démolissant les tours, démantelant les murailles, ruinant les chemins couverts, comblant le puits et démolissant les étages supérieurs du donjon. Aussi, quand les envoyés de Philippe Auguste vinrent reprendre possession de la forteresse, ils n’y trouvèrent plus que des ruines…

Plan de Coutil, 1909.

Plan de Philippe Lemaitre.

Le château

D’une contenance considérable de 4,6 hectares, le château forme un vaste ensemble de 280m de long par 165m de large. Il se compose au nord d’une basse cour utilisée en ouvrage avancé appelé communément « le grand Ber » et qui est entourée d’un large fossé.

Au sud vers le plateau, prend place une autre basse cour très vaste entourée par un fossé et protégée par un talus renforcé partiellement par un mur maçonné.

Au centre se situe l’enceinte principale d’une contenance de 3 600 m2 formant une courtine protégée par quatre tours d’angle, une tour porte et deux tours semi-circulaires. Ensemble maçonné les courtines sont composées de silex à parement et de pierres calcaire constituant les arrêtes. Cette pierre calcaire proviendrait d’une carrière située à Pont-Authou.

Les murs de courtines, épais de 2 mètres, atteignent une hauteur maximale de 5 mètres mais un remblai important interdit une lecture précise de leurs dimensions.

Cette enceinte était défendue par deux fossés dont le premier, qui l’entourant complètement, avait 39 mètres de largeur et 9 mètres au moins de profondeur.

Maquette du château médiéval Anglo/Normand XIe/XIIe contemporain de la période ducale réalisée par Mr Gilles Mauger.

À l’intérieur de l’enceinte, placé au sud-ouest et assez loin de l’entrée, se distingue un donjon de forme rectangulaire.

Le donjon de 18 mètres sur 16 mètres et dont ne subsiste que le premier niveau est implanté au sud ouest de la haute cour. De forme rectangulaire, il présente des vestiges de contreforts plats aux angles et au milieu. Une chemise l’entoure encore partiellement et l’isole du reste de la haute cour.

Les matériaux composant les maçonneries sont pour l’essentiel composés de silex à parements et de blocaille. Les arrêtes et les soubassements révèlent un appareillage de pierre calcaire bien agencé.

À noter à l’arrière du donjon, le mur de courtine réalisé en Opus Spicatum témoignant d’un type de maçonnerie ancien mis en œuvre dès les 9e et 10e siècles.

L’entrée principale se compose d’une tour porte fortifiée qui renfermait probablement à l’un des étages supérieurs la chapelle du lieu élevée sous le vocable de Saint Nicolas. La sente sise à proximité des douves sud-ouest a reçu la même appellation en raison de la proximité de la chapelle.

Les structures de la poterne au niveau de la tour porte ont été relevées lors du sondage archéologique réalisé sous l’égide de Madame Claude Gilles en 1977 et 1978.

Les fouilles

Lors des campagnes réalisées par l’association Chantier Histoire et Architecture Médiévale (CHAM) en 2009, 2010 et 2011, des modifications intervenues en plusieurs emplacements ont été clairement relevées faisant état de deux époques de constructions différentes. Les parties sommitales ont été reprises rehaussant les murs de l’enceinte et un glacis a été ajouté sur l’extérieur des courtines. Ces deux éléments attestent un renforcement évident en vue d’une défense militaire accrue. Il en est de même pour les tours d’angles et la tour éperon dont l’implantation vient clairement s’ajouter dans un dispositif initial plus sommaire. Ces modifications reflètent vraisemblablement les transformations effectuées par Hugues IV évoquées au gré des textes et faisant suite aux nécessités imposées par le conflit avec le roi d’Angleterre.

Différents récits ont évoqué deux périodes de construction pour le château. En effet lors de la dernière campagne de CHAM, une archère, transformée puis modifiée en point de lumière, a été clairement identifiée en pleine courtine alors même que les tours de flanquement présentent des points de tirs plus efficaces. Nous serions donc en présence des premières défenses réalisées avant les transformations évoquées ci-dessus. Notons que les campagnes de CHAM ont permis de réparer et solidifier plusieurs ouvrages menacés et de les pérenniser dans la durée. L’édifice castral est inscrit à l’Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques depuis le 13 septembre 1937.

Ouvrages de référence

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