Son histoire

Lorsque le Louis IX apprend que l’abbaye d’Agaune à Saint-Maurice (Valais) possède une grande quantité de reliques de saint Maurice et de ses vingt-quatre compagnons martyrs de la légion thébaine, il sollicite cette abbaye pour en recevoir une partie, « tant pour la gloire de Dieu que pour l’édification du peuple de la France ». En même temps, le roi propose des épines de la Sainte Couronne en échange. L’abbé d’Agaune répond favorablement à cette requête, et c’est apparemment à la réception de cette réponse que saint Louis décide de la fondation du prieuré Saint-Maurice dans la ville de Senlis. Il fait savoir à l’abbé d’Agaune que les reliques trouveront leur domicile dans cette ville, et bientôt après, ce dernier se met en route, accompagné d’une petite délégation de ses chanoines. En effet, quand le roi apprend que le cortège approche de Senlis, avec quatorze châsses dans les bagages, il est pris au dépourvu : rien n’est prévu pour l’accueil des hôtes, et encore moins le prieuré n’est-il construit. Le prieur d’Agaune et ses acolytes sont donc accueillis avec tous les honneurs au château de Mont-l’Évêque, à proximité, alors que Louis IX met tout en route pour préparer un événement digne des illustres reliques à Senlis, réunissant à cet effet les prélats, barons et autres personnes souhaitant y participer. La grande fête est prévue pour le 5 février 1262. Dès la veille, plusieurs évêques et abbés ont rejoint Mont-l’Évêque, et au matin, l’évêque de Senlis, Robert de Cressonsacq, vient chercher les visiteurs suisses en compagnie de l’ensemble du clergé senlisien. La population y assiste en grand nombre. Les châsses, désormais au nombre de vingt-cinq pour correspondre au nombre des saints dont ils contiennent les reliques, sont portés à Senlis par autant de barons ou chevaliers. Après la grande messe solennelle à la cathédrale, les reliques sont entreposés dans la chapelle royale Saint-Denis.

Les travaux doivent être menés de façon accélérée pour que cette solution provisoire ne dure pas. La construction du prieuré dure exactement vingt-six mois. L’inauguration peut être célébrée le dimanche 1er juin 1264, dans la nouvelle chapelle Saint-Maurice du prieuré, présidée par le roi et l’évêque de Senlis. Plusieurs autres évêques sont présents, et la foule est considérable. La chapelle prieurale est dédiée à la Vierge, à Saint-Maurice et à ses compagnons. De par ses vitraux colorés et par son architecture légère, la chapelle aurait été une reproduction de la Sainte-Chapelle de Paris, antérieure de seize années. Si rien ne permet aujourd’hui de vérifier ces allégations, l’on peut douter que la chapelle de Senlis ait eue deux étages, et les quelques éléments sculptés qui en subsistent (chapiteaux du portail, clés de voûte et consoles) ont certes une très grande qualité d’exécution, mais témoignent de l’austérité que la règle de saint Augustin imposait. D’autre part, l’on sait que la liturgie à la chapelle Saint-Maurice de Senlis était celle de la Sainte-Chapelle de Paris.

La charte de fondation prévoit un nombre de douze chanoines réguliers de saint Augustin sans compter le prieur. Le roi lui-même et Robert de Cressonsacq édictent un règlement, qui stipule entre autres la couleur rouge de l’habit des moines, empruntée de l’abbaye d’Agaune : en effet, l’abbaye valaisienne est déclarée maison-mère. Pour assurer le fonctionnement du prieuré, les revenus de la chapelle royale Saint-Denis (au château royal) lui sont affectés. Cette dernière chapelle perd en même temps son statut de chapelle royale.

Le roi Philippe le Hardi, fils de Saint Louis, lègue dans son testament une somme de cinquante livres tournois au prieuré, même somme qu’avait déjà lègué son père. À la fin du XIIIe siècle, le prieuré possède le moulin de Sénecourt à Catenoy et a le droit exclusif sur la quête dans l’église de ce village. En 1376, les reliques s’enrichissent d’une partie du bras de saint Maurice. – En vue d’une réforme du monastère, le pape Léon X nomme Antoine Parent, prieur de Saint-Christophe à Fleurines, prieur de Saint-Maurice. Avec une bulle datée de 1518, Parent essaie trois ans plus tard de prendre possession du prieuré, mais les religieux refusent, ne voulant accepter un prieur de l’ordre de Cluny. Plusieurs tentatives de réformer Saint-Maurice restes vaines en raison de l’obstination du prieur Jacques Monnot, jusqu’à ce que Guillaume Parvy parvienne à rattacher le prieuré à la congrégation de Saint-Victor en 1530. Désormais, les religieux doivent porter une robe blanche. Les discussions sur la réforme ne cessent pas encore pendant les années qui suivent. En 1571, Saint-Maurice a l’honneur d’accueillir le chapitre général de la congrégation en ses murs. Henri IV vient deux fois y entendre la messe en 1594.

En 1638, le président Amelot réunit administrativement le collège de Senlis fondé en 1523 au prieuré Saint-Maurice. Sous l’impulsion du cardinal de La Rochefoucauld, le prieuré est rattaché aux génovéfains en 1643. Les moines de l’abbaye Saint-Vincent, affiliée à cette même congrégation, en prennent possession le 14 avril 1643, accompagnés par Charles Faure, abbé de l’abbaye Sainte-Geneviève du Mont et général des génovéfains. Les anciens religieux de Saint-Maurice sont contraints de partir, mais sont récompensés par une pension de 400 livres chacun.

Outre le moulin déjà mentionné, le prieuré possède diverses portions de bois en forêt d’Halatte, un vivier au faubourg Villevert attesté en 1627, et une ferme à Saint-Pathus, attesté en 1754. Les armes du prieuré Saint-Maurice sont d’azur à trois fleurs de lys d’or au chef d’argent au léopard issant de gueules.

D’importants travaux sont exécutés durant la seconde moitié du XVIIe siècle et au XVIIIe siècle. Or, le nombre de moines décline, et en 1768, la commission des Réguliers décide de la suppression du monastère n’y trouvant plus que trois religieux. L’ancien prieuré est vendu comme bien national à la Révolution, et le célèbre acteur Pierre-Louis Dubus, dit Préville s’en porte acquéreur. Il revend toutefois dès 1795 à Monsieur de Malézieu de Crépy-en-Valois. C’est lui ou son prédécesseur qui fait raser le cloître et la chapelle. En 1816, la famille Turquet de la Boisserie rachète ce qui reste de l’ancien prieuré, avant d’acquérir les ruines du château royal en 1835, et le potager à l’actuel emplacement du jardin du Roy (au nord du rempart) en 1846. Comme déjà mentionné plus haut, la ville de Senlis achète les trois composants du domaine des Turquet de la Boisserie en 1956, dans le but notamment de disposer, avec l’ancien logis du prieur, d’un local bien adapté pour accueillir le musée de la Vénerie à l’étroit dans la chapelle de la Charité. Cependant, l’ouverture du parc autour de l’ancien prieuré et des ruines du château au public remonte à une période plus ancienne. Au début du XXe siècle, un guide touristique précise qu’il faut sonner à la loge du concierge qui accompagne le visiteur lors de sa visite, moyennant un pourboire.

Description des bâtiments

De l’ancien prieuré, restent deux bâtiments se faisant face, isolé l’un de l’autre, et construits dans des styles complètement différents, si bien que leur lien historique ne se devine pas en les regardant. Il s’agit de l’ancien palais du prieur commendataire du XVIIIe siècle, grande maison de deux étages évoquant une demeure bourgeoise, et de l’ancien bâtiment des moines, dont le rez-de-chaussée remonte au XIIIe siècle.

Les différents bâtiments du prieuré étaient initialement agencés autour d’un cloître carré. Le logis du prieur en formait le côté occidental, et le bâtiment des moines le côté oriental. Au nord, le cloître était fermé par le mur méridional de la chapelle, dont la tradition orale veut qu’elle ait été bâtie selon le modèle de la Sainte-Chapelle de Paris. Or, jusqu’à ce jour, aucune représentation picturale n’en est connue, et sa disposition est uniquement connue d’après un plan des masses très schématique conservé à la bibliothèque Sainte-Geneviève de Paris. La nef se composait de trois travées avec un bas-côté au nord seulement. Le Choeur (architecture) polygonal comportait deux travées et une chapelle latérale au nord, à chevet plat.

Le bâtiment des moines est construit tout en longueur, avec un haut pignon et des façades austères, percées de grandes fenêtres à meneaux au niveau de l’étage, côté cloître. Plusieurs petites ouvertures ont été bouchées. Côté cloître également, l’on peut toujours voir une succession de trois arcades en arc brisé, dont celle au milieu plus haute que les autres : c’étaient la porte et les fenêtres de la salle capitulaire, qui, depuis le nord, suivait l’escalier intérieur et la sacristie. Venaient ensuite la bibliothèque et le chauffoir, pièces qui ne sont plus conservées dans leur état d’origine. Sous le pignon nord, se trouve aujourd’hui l’une des deux entrées, avec un escalier extérieur desservant directement l’étage. L’autre entrée se situe impasse Baumé, mais la belle porte au portail flamboyant n’a été montée ici qu’en 1993. Elle provient du couvent des cordeliers, rue des Cordeliers, et en était l’ultime vestige. L’élément le plus remarquable du bâtiment des moines est le grand dortoir des moines à l’étage, qui en occupe toute la longueur. Parfaitement restauré, cette salle probablement construit vers le début du XVIe siècle conserve sa charpente en carène d’origine, vieille de cinq cents ans. Le dortoir des moines accueille aujourd’hui des manifestations culturelles de la ville de Senlis et n’est ouverte à la visite que lors des journées européennes du patrimoine.

Le logis du prieur est proche du style classique, mais la grand sobriété de son architecture ne permet pas le développement d’un style particulier. La façade orientale est quand même d’une certaine élégance, qu’elle doit à sa harmonie et aux hautes fenêtres. Elle est précédée par deux avant-corps latéraux, de la largeur d’une travée, et s’arrêtant après le premier étage. Celui de droite (au nord) comporte un portail avec un entablement de style classique. L’entrée se fait par une porte-fenêtre au milieu, avec deux fenêtres de chaque côté, accompagnées de volets. Aux étages, le rythme des fenêtres change, il n’y a que trois fenêtres par niveau, ainsi que deux oeils-de-boeuf qu premier étage. Le toit présente également trois lucarnes alignées sur les fenêtres. Par ailleurs, les caves sur deux niveaux du bâtiment précédent subsistent toujours, et ont été restaurées par la ville de Senlis. La deuxième cave renferme un puits très profond.

Sur le chemin vers le logis du prieur, une copie en bronze du XIXe siècle, de la « Diane au cerf » du château d’Anet a été posée. L’original est une œuvre de Jean Goujon. Puis, derrière le musée près de la porte sur la place Saint-Maurice à l’ouest, le petit obélisque provenant du carrefour des Égyptiennes ou carrefour de l’Obélisque devant l’ancienne porte Bellon du rempart médiéval a trouvé un nouveau domicile. Ce carrefour se trouvait près du monument de la fraternité franco-marocaine, cours Boutteville. L’obélisque avait été érigé en 1779 pour célébrer la naissance de Marie-Thérèse de France, premier enfant de Louis XVI et Marie-Antoinette au bout de huit années de mariage.

Ouvrages de référence

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