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En 1079, l’abbé bénédictin Gérard de Corbie et une dizaine de moines et de chevaliers fondent Notre-Dame de La Sauve-Majeure dans la grande forêt de l’Entre-deux-Mers. Le soutien des ducs d’Aquitaine et le pèlerinage vers Saint-Jacques-de-Compostelle favorisent un rapide essor. À son apogée aux XIIe et XIIIe siècles l’abbaye compte une centaine de moines et est à la tête de plus de 70 prieurés d’Aragon en Angleterre. La guerre de Cent Ans précipite son déclin.

À la fin du XVIIe siècle, une dizaine de religieux mauristes tentent une restauration. La première représentation de l’abbaye, dans le Monasticon Gallicanum, date de 1679. Autour du cloître s’organisent l’église et les espaces de vie commune : chapitre, scriptorium et dortoir, réfectoire, cuisines et cellier. Après la Révolution, le site est à l’abandon.

De 1837 à 1910, l’abbaye accueille tour à tour une institution catholique, un collège jésuite puis la première École normale d’instituteurs de Gironde, dans l’ancien logis abbatial agrandit. Ces bâtiments sont détruits après un incendie en 1910.

Aujourd’hui, l’abbaye garde son plan caractéristique de l’architecture bénédictine. Chef-d’oeuvre de l’art roman, elle invite à la découverte de ses espaces et de ses riches vestiges : disques de consécration, chapiteaux sculptés, chevet de l’église, salle capitulaire, cloître et réfectoire.

Abbaye de La Sauve Majeure - Association French Baroudeur

Évocation de l'abbaye au XIe siècle

Abbaye de La Sauve Majeure - Association French Baroudeur

Évocation de l'abbaye au XIXe siècle

Abbaye de La Sauve Majeure - Association French Baroudeur

Le rayonnement de l'abbaye

L’influence de La Sauve Majeure se développe dès son implantation. Les guérisons miraculeuses attribuées à Gérard de Corbie contribuent à faire connaître l’abbaye en Europe. Elle devient ainsi un lieu de pèlerinage sur les chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle.

Dès le XIIe siècle, l’abbaye acquiert de nombreuses possessions en Gironde et en Europe de l’Ouest. Le roi Sanche Ier d’Aragon et de Navarre (1063-1094) lui fait don de prieurés et de châteaux. Ces places fortes favorisent la reconquête de la péninsule ibérique, face à la domination des Sarrasins.

Suite au mariage, en 1152, d’Aliénor d’Aquitaine avec Jenri II Plantagenêt, La Sauve Majeure est placée sous tutelle anglaise, et étend son influence.

À la fin du XIIIe siècle, La Sauve-Majeure devient ainsi l’abbaye la plus puissante de la région, forte d’un réseau de plus de 70 prieurés.

L’architecture et la sculpture de La Sauve-Majeure sont des éléments évocateurs de ces liens et échanges à l’échelle européenne. L’abondance et la qualité du décor sculpté témoignent de sa puissance et de sa renommée. Les caractéristiques stylistiques de l’atelier dit de « La Sauve-Majeure » se retrouvent dans d’autres édifices de l’Entre-deux-Mers (telle l’église de Saint-Quentin-de-Baron). La façade romane, aujourd’hui disparue, et nombre de ses chapiteaux lient l’église abbatiale à l’art roman de la Saintonge (région de Saintes).

Grâce à la multiplication des chantiers et des relations entre les artisans, les modèles iconographiques circulent. La Sauve-Majeure n’est pas isolée ; elle rayonne au centre d’un réseau d’échanges politiques et artistiques.

L'abbaye au fil du temps

Depuis la pose de la première pierre de la Sauve-Majeure en 1080, de nombreuses campagnes de construction ont ponctué l’histoire architecturale de l’abbaye.

Il reste très peu de traces archéologiques de l’église abbatiale initiale, hormis l’enveloppe de la nef, la partie nord du transept et un certain nombre de décors sculptés. Ce premier édifice roman est rebâti dès le début du XIIe siècle, ce dont témoigne le chevet encore en place

Au milieu du XIIe siècle, l’abbatiale est transformée et s’inspire du style gothique naissant. Une partie des murs est rehaussée et surmontée de voûtes d’ogives. Néanmoins, la tradition romane persiste dans la réalisation des décors sculptés. La tour clocher romane est surélevée à deux reprises à partir du XIIIe siècle. Son plan, initialement carré, est augmenté de deux étages octogonaux, ornés de baies géminées. À son sommet, la flèche n’a peut-être jamais été achevée.

Au XVIIe siècle, les moines mauristes investissent l’abbaye et réhabilitent les espaces monastiques détériorés. La gravure du Monasticon Gallicanum propose d’ailleurs un aperçu de l’abbaye et de son portail roman richement décoré. Son abandon progressif au XVIIIe siècle puis son exploitation comme carrière de pierre finissent de la ruiner. Enfin en 1837, un nouveau bâtiment est construit pour accueillir un collège jésuite, qui, par la suite, deviendra la première École normale de Gironde, où seront formés des instituteurs jusqu’en 1910.

Sauver La Sauve

Malgré l’état de déshérence que connaît encore l’abbaye au début du XXI siècle, les pouvoirs publics s’attachent à préserver ses vestiges, en procédant notamment au classement de ce monument historique en 1929.

En 1952, une première campagne de restauration débute. Les travaux interviennent d’abord sur les parties les plus endommagées de l’abbatiale (chevet, nef et clocher). L’objectif principal est de consolider le monument et de sécuriser le site pour en permettre l’ouverture au public. Puis, la priorité est donnée au chevet car l’abside principale et l’abside sud sont dans un état de délabrement très avancé : la voûte en cul-de-four est éventrée et la plupart des pierres de parement ont disparu. Il est alors décidé de conserver les rares enduits et de mettre en valeur les baies, par l’insertion de grillages losangés censés rappeler les vitraux médiévaux. En 1959, face au risque d’effondrement, la restauration du clocher devient prioritaire.

Depuis 1962, les ruines ayant été stabilisées, la politique de restauration évolue vers une meilleure compréhension. La salle capitulaire et les piles du bas-côté nord de l’église sont restituées, les vestiges du réfectoire sont mis à jour. Dans le chevet, des enduits peints sont restaurés et la plupart des modillons sont repris. Les décors sculptés sont nettoyés.

De façon générale, une politique régulière d’entretien facilite la conservation de l’abbaye, qui fait l’objet d’une attention constante.

C’est un équilibre fragile, auquel il faut veiller sans cesse.

Construire l'abbaye

À l’époque médiévale, la construction d’un ensemble monumental est un chantier d’envergure qui fait appel à une grande diversité d’artisans. Le travail de la pierre est omniprésent, mais le bois, le verre et le fer sont aussi des matériaux indispensables. De nombreux corps de métier sont donc sollicités, depuis la conception des plans jusqu’à la réalisation du décor.

Une abbaye est un ensemble architectural fonctionnel et complexe, chargé de sens et de spiritualité, où dialoguent éléments architecturaux et ornementaux. Ils évoluent au fil des siècles en fonction des goûts et des pratiques. Conçue à la période romane, La Sauve-Majeure s’enrichit à la période gothique de nouvelles structures et de nouveaux décors : un clocher, des chapiteaux… Par la suite, de nouvelles transformations interviennent : des bâtiments sont réhabilités voire ajoutés en adéquation avec son usage.

Chantier et bâtisseurs

Plusieurs corps de métier interviennent dans la construction d’une abbaye comme La Sauve-Majeure. Chacun appartient à une chaîne d’exécution bien organisée.

Le maître d’oeuvre, équivalent d’un architecte, réalise les plans de l’édifice en fonction des souhaits du commanditaire. Puis, le maître maçon organise les travaux, veille à l’avancée du chantier et supervise les ouvriers. Le maître d’oeuvre occupe parfois cette fonction.

Dans la carrière, le carrier débite grossièrement les blocs de pierres. Son rôle est aussi de les apporter sur le chantier, où ils sont confiés au tailleur qui leur donne une forme cubique et appose sa marque dite de « tâcheron ». Cette dernière indique la tâche accomplie chaque jour par l’ouvrier en vue de sa rémunération. Il réalise ensuite l’épannelage pour faciliter le travail du sculpteur qui met en image la pierre. Une fois la sculpture exécutée, le bloc est enchâssé dans la maçonnerie. Pour certains détails, le sculpteur peut intervenir après la mise en place de la pierre, directement sur l’édifice.

D’autres artisans interviennent sur le chantier aux côtés des travailleurs de la pierre : les ateliers de verriers, de peintures, de forgerons, ceux des charpentiers… L’élévation d’un mur ou le percement d’une baie nécessitent la mise en place d’un échafaudage provisoire en bois, dont témoignent encore en creux les trous de boulins.

Abbaye de La Sauve Majeure - Association French Baroudeur
Abbaye de La Sauve Majeure - Association French Baroudeur

Vivre l'abbaye

La vie dans une abbaye bénédictine, telle que celle de La Sauve-Majeure, est très hiérarchisée. À sa tête, l’abbé dirige tant les aspects matériels que spirituels du monastère. Sous sa direction, les autres moines sont frères. Cette hiérarchie suit les préceptes de la règle bénédictine, écrite par Benoît de Nurse au Vie siècle de notre ère.

Le quotidien des moines est rythmé par les « heures » (matines, vêpres…), huit moments de la journée au cours desquels ils se réunissent pour prier. Les moments de travail et de repos sont prévus entre les prières.

Les moines vivent en autonomie dans l’abbaye mais ne sont pas complètement coupés du monde extérieur. Outre l’entretien des jardins monastiques, ils assurent la gestion de nombreuses possessions hors les murs, l’accueil des malades, pèlerins et voyageurs logés dans l’hôpital ou l’hostellerie du monastère.

La vie quotidienne au monastère

L’abbé fait respecter la règle bénédictine, qui a pour vocation d’organiser la vie monastique autour des moments de prière, de travail, de repos et de méditation. La journée du moine obéit à l’Opus Dei, expression latine pour « Oeuvre de Dieu », soit la liturgie des heures.

La communauté se rassemble donc autour de prières communes, huit fois par jour, comme les primes à la première heure ou les vêpres au coucher du soleil. En dehors des offices religieux, les moines s’adonnent essentiellement au travail manuel et à la lecture.

L’architecture de l’abbaye est conçue en fonction de cette vie dans le monastère. L’église abbatiale est réservée à la liturgie des moines qui se réunissent dans le choeur. Le dortoir, situé à l’étage du cloître, est directement relié à ce dernier, permettant aux moines de s’y rendre directement la nuit pour les prières, comme les laudes à l’aurore. L’église abbatiale peut aussi accueillir hôtes et pèlerins, bien qu’au quotidien les laïcs prient dans l’église paroissiale.

Toujours au coeur de l’abbaye, le cloître, espace de circulation et de méditation, est constitué d’une galerie quadrangulaire ouverte sur un jardin. Il dessert les espaces centraux du monastère : l’église, la sacristie, la bibliothèque, le scriptorium, le réfectoire et la salle capitulaire. C’est dans cette dernière que, chaque matin, l’abbé lit un chapitre de la Bible puis détermine les tâches du jour. c’est aussi une salle de justice dans laquelle l’abbé sanctionne les moines n’ayant pas respecté la règle. Des espaces dédiés aux commodités sont également prévus dans l’abbaye : pressoir, cuisines, écuries, forge… Enfin, dans la cour des communs, d’autres constructions telles que la bergerie ou le poulailler sont nécessaires à la vie de la communauté.

L'organisation monastique

À la fin du XIIe siècle, La Sauve-Majeure, à son apogée, compte une centaine de moines et de très nombreuses dépendances. Une telle communauté nécessite une hiérarchie rigoureuse. La sauveté fonctionne comme une seigneurie dont les moines seraient les gestionnaires et l’abbé le seigneur. Celui-ci désigne certains frères pour tenir des offices claustraux.

Les offices claustraux religieux comprennent les fonctions liées au spirituel. L’abbé est épaulé par le grand prieur, son adjoint direct, chef des services internes de l’abbaye. Il le remplace lors de ses absences et il est souvent élu à la suite de son décès. L’abbé est également accompagné du chapelain, son conseiller et confesseur. Deux autres moines se partagent la gestion des cérémonies : le sacriste organise les cycles de prières et entretient le mobilier liturgique ; le démentir est en charge des obsèques. Quant au bibliothécaire, il dirige les moines copistes et assure la bonne conservation des archives et des manuscrits de l’abbaye.

Les offices claustraux en charge du temporel assurent la gestion matérielle de l’abbaye et ses relations avec le monde extérieur. Ainsi, le cellérier gère les biens de la sauveté, organise les travaux agricoles et perçoit les taxes. À l’intérieur de l’enceinte, plusieurs moines régissent l’abbaye. Parmi eux, le camérier entretient les dortoirs, le pitance s’occupe des réserves de nourriture, le jardinier des espaces verts. L’hostellier et l’aumônier, quant à eux, accueillent les pèlerins et les voyageurs ; le premier loge les hôtes de marque, le second les voyageurs plus modestes.

La diversité des offices claustraux, plus nombreux encore que ceux cités, démontre l’importance et la prospérité de La Sauve-Majeure.

Des images, des figures

Les scènes historiées, très présentes dans les édifices religieux, trouvent leurs origines dans les récits mythologiques, bibliques et les légendes chrétiennes.

Ces images s’inscrivent dans une iconographie qui porte un discours moraliste et instructif. Elles constituent un récit qui prend son sens dans la lecture de la globalité de l’édifice, mais certains épisodes peuvent être composés sur un même élément architectural. Par exemple, à La Sauve-Majeure, une clé de voûte représente le Péché originel. Le Serpent enroulé autour de l’Arbre tente Adam et Ève qui mangent déjà chacun un fruit. il montre donc les différents moments de cette histoire.

Les récits parlent à des esprits érudits comme ceux des moines mais ont aussi une fonction didactique pour l’ensemble de la communauté chrétienne. Au XIIe siècle, à une époque où 95% de la population ne sait pas lire, y compris les seigneurs, ces images ont un rôle éducatif. Elles véhiculent la parole de Dieu et les préceptes de l’Église.

L’image médiévale est codifiée ; les positions et proportions des figures indiquent des rapports de hiérarchie. En général, plus un personnage est grand, plus il est important et un personnage de face représente la perfection. Le visage est particulièrement mis en avant par rapport au corps. Ainsi, l’atelier dit « de La Sauve-Majeure » sculpte des silhouettes disproportionnées. Les têtes surdimensionnées présentent un visage triangulaire et des yeux en amande, caractéristiques de cet atelier.

Imager l'abbaye

Monument remarquable de l’art roman, l’abbaye de La Sauve-Majeure conserve les témoignages d’une sculpture aux images variées : ornements, figures, scènes historismes, animaux…

À la période romane, les différents éléments architecturaux servent de supports aux images, dont ils favorisent la multiplication et la diversité. Le modèle du chapiteau corinthien antique est repris dans un premier temps. Les artisans s’en éloignent peu à peu, en ajoutant d’abord des figures (animaux, personnages) puis des scènes historiées complexes. L’image n’est pas un simple décor : elle participe du sens de l’architecture.

Les sujets sont puisés dans les mythes antiques, bibliques et autres récits du christianisme. Les représentations ont en général une portée symbolique et didactique qui valorise les vertus chrétiennes et illustre la victoire du Bien sur le Mal. Un certain nombre de ces images, les représentations d’animaux et créatures fantastiques, est épuisé dans des recueils populaires, les bestiaires. Chaque « geste » est un être allégorique chargé de valeurs positives ou négatives, qui s’inscrit dans une vision chrétienne du monde.

Abbaye de La Sauve Majeure - Association French Baroudeur
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Raconter l'abbaye

De la fondation de l’abbaye à sa contemplation actuelle, La Sauve-Majeure jouit d’une histoire riche. Son rayonnement politique et artistique, ainsi que son déclin s’inscrivent au coeur d’enjeux historiques majeurs.

L’abbaye offre un témoignage incontournable de l’essor de l’Aquitaine médiévale, au temps d’Aliénor (1154-1189). Créée au XIe siècle, l’abbaye et sa sauveté connaissent leur apogée à la fin du XIIe siècle. Durant cette période florissante, La Sauve-Majeure joue un rôle déterminant en Europe, à la tête d’un réseau de prieurés étendu du nord de l’Espagne à l’Angleterre.

Sa prospérité économique est considérablement affaiblie par les baisses successives de revenus causées par la guerre de Cent Ans, puis par les guerres de Religion. Malgré une influence réduite, son histoire se prolonge bien au-delà de l’époque médiévale. Pendant la Révolution française, l’abbaye est transformée en prison. Ses bâtiments sont ensuite exploités comme carrière de pierre, avant que l’École normale d’instituteurs s’y installe au XIXe siècle. Au-delà des vestiges d’un passé religieux, l’abbaye de La Sauve-Majeure a traversé les siècles pour devenir un monument de notre patrimoine national.

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