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La terre de Picquigny fut l’une des principales et plus belles seigneuries du royaume, par son étendue, ses domaines, avec ses droits singuliers, ses prérogatives et ses 1800 vassaux.
Le domaine comprenait deux parties distinctes, l’une située sur les deux rives de la Somme composant le Vidamé, l’autre au nord de la Somme composant l’avouerie de Corbie ( ancien comté de Corbie ).
Il y avait environ 700 seigneuries ou fiefs dans la mouvance de Picquigny (vidamé et avouerie réunis), et 443 arrière-fiefs relevant de la châtellerie de Vignacourt réunie au domaine de Picquigny au 14ème siècle.
C’était une baronnie primitive du royaume, une Seigneurie de franc-aleu, ne mouvant de personne.
Leur puissance tenait surtout à leur qualité attestée dès le XIe siècle, de Vidames d’Amiens, parce qu’ils relevaient de l’Evêque dont ils étaient les défenseurs et à qui ils rendaient hommage.
Le Vidame commandait les troupes de l’Evêque et exerçait le pouvoir temporel .
Chaque nouveau Seigneur Avoué héréditaire de l’évêché recevait l’investiture épiscopale, le prélat mettait alors un anneau d’or au doigt du Vidame qui devait ensuite rendre le même hommage à l’abbé de Corbie. Il était également Avoué de l’Abbaye de Corbie.
Les Seigneurs de Picquigny frappaient monnaie.
En 613, il y a déjà un Baron à Picquigny.
632 / 639 ?, prise du Château par le Roi Dagobert 1er, Roi d’Austrasie. Il conquiert la Neustrie dont dépend la Picardie et la Bourgogne, il devient Roi des Francs. Son fils Clovis II héritera de la Neustrie et Bourgogne, Sigebert III aura l’Austrasie.
Eustache ….
Guermond 1er 987-1048 : marié avec Adèle d’Ailly
Enfants probables : Eudes, Ansculf, Eustache, Arnould ?
Eudes 1010-1076 : marié avec Louise de Conty
Enfants probables : Eustache, Jehanne, Guillaume ?
Eustache 1042-1085 (serait le premier Vidame) : marié avec la fille du Comte de Ponthieu Blanche de Domart
Il érige l’église de Picquigny en 1066 et fonde le chapitre St-Martin (il sera inhumé dans l’église). Il participe avec Guillaume II Duc de Normandie, dit Guillaume le Conquérant, à la conquête de l’Angleterre accompagné de quelques membres de sa famille dont Ansculf et Ghilo.
Ansculf joue un rôle important dans la conquête, il reçoit en récompense de Guillaume, devenu roi d’Angleterre, 80 manoirs répartis sur 11 comtés. Il construit le château de Dudley et fonde la baronnie de Dudley, gardant le patronyme « de Picquigny », « Pinckney » en Angleterre, qui a perduré jusqu’à nos jours.
Arnould né en 1045 (mort ?), frère d’Eustache ?
Arnould (ou Arnoul) épouse Rénate de Crécy, ils ont 2 enfants : Mellissende et Guermond.
Guermond (ou Wermond) 1112-1128 : marié avec Béatrix de Daours (6 enfants)
Il affronte une rébellion communale (vers 1113 ou 1117).
Blesse d’un coup de lance Thomas de Marle (fils d’Enguerran de Boves).
En 1115, il emprisonne au château Adam châtelain d’Amiens.
Il est fait prisonnier par le Comte de Ponthieu.
Guermond de Picquigny part en croisade avec Godefroy de Bouillon, il sera Patriarche de Jérusalem.
Gérard ( ou Girard ) 1131-1178 ) : marié avec Béatrix d’Aumale.
Il fonde l’Abbaye du Gard (ordre de Clairvaux) et la léproserie de Tenfol, En 1154 il pille quelques censes appartenant à l’Abbaye de Selincourt.
Il est inhumé à l’ Abbaye du Gard.
Guermond III 1178-1186 :
Marié avec Flandrine d’Amiens, fille de Gui de Boves.
Gérard II 1186-1190 :
Il meurt en Judée ou il avait suivit Philippe Auguste (sans enfants).
Enguerrand 1190-1224 ( frère de Gérard II ) :
Marié avec Marguerite de Ponthieu, il fit 9 enfants. En 1214, il est au service du Roi Philippe Auguste en guerre contre Othon.
1206 : Wallon de Sarton, chanoine de Picquigny ramène de croisade la relique de St Jean Baptiste qu’il remet à l’Evêque d’Amiens.
Gérard III 1224-1248 ( marié 3 fois , 6 enfants ) :
Une épouse reconnue, Laure de Montfort. D’autres épouses : Alix de Vierzon, Mathilde ou Mahaut de Crésecques.
En 1242 il combat avec Louis IX contre le Comte de la Marche. En 1248 son frère Guillaume de Picquigny participe à la septième croisade avec Louis IX (Saint Louis), il commande un corps d’armée en terre sainte.
Jean 1er 1249-1304 ( 11 enfants )
1ère épouse Marguerite de Beaumetz.
2éme épouse Isabeau de Brienne.
3éme épouse ? Marie de Molleans ?
Gouverneur d’Artois et d’ Arras, Sénéchal de Gascogne « Chevalier sage, loyal et gentil ». En 1298 il siège au parlement et se rend en Angleterre pour les affaires du Roi Philippe le bel. En 1303 il commande une armée en Gascogne contre les Anglais. En 1304 il participe aux batailles contre le Comte de Flandre (son fils le remplacera).
En son absence, c’est Robert de Lignières qui assume la charge de Châtelain de Picquigny.
Renaud 1304-1315 , épouse Jeanne de Brienne, fille du Comte d’ Eu. 2 filles
En 1307, sur ordre du Roi Philippe le Bel, il arrête et emprisonne au château les Templiers établis dans le bailliage d’Amiens.
À cette époque, Ferry de Picquigny frère de Renaud est Seigneur d’Ailly sur Somme.
Marguerite 1315-1378 :
Vidamesse, Dame et Baronne, d’abord sous tutelle de son oncle Gérard. Dernière du nom de Picquigny, sans enfants. Mariée en 1323 avec Jean de Roussy. Remariée en Juillet 1328 avec Gaucher de Noyers. Remariée vers 1358 avec Raoul de Rainneval sieur de Pierrepont, Grand Panetier de France.
Gouverneur du château en 1316, Mathieu Gaude seigneur de Saint Ellier.
Le 23 Août 1350 elle est convoquée par le Roi Jean le Bon pour une entrevue, son oncle Gérard de Picquigny l’accompagne.
En 1346, Edouard III d’Angleterre, avec son armée en retraite ne peut forcer le pont de Picquigny trop bien défendu, il passera la Somme au gué de Blanquetaque.
Sans postérité, le Parlement adjuge ses titres et biens à une cousine germaine (décision du 17 aout 1381).
Marguerite II 1378-1398 :
Fille de Robert de Picquigny, Seigneur de Fluy (cousine germaine de Marguerite 1ère), mariée le 12 Nov. 1342 avec Robert III dit Wautier Seigneur d’Ailly le haut clocher. 7 enfants : Wautier, Bauduin, Colard, Mathieu (Seigneur d’Airaines), Jacques (Seigneur de Famechon), Isabeau, Jeanne.
Bauduin 1398-1415 ( dit Baugeois ) : marié avec Jeanne de Rayneval, 2 enfants Raoul et Jeanne
Il fut Chambellan du Roi Charles VI et fit partie du Conseil de Régence. Il est tué à la bataille d’Azincourt le 25 Octobre 1415.
RAOUL 1415-1455 : 11 enfants
Il est fait Chevalier à la bataille de St Rémy (victoire sur les Armagnacs).
Partisan du Duc de Bourgogne. En 1431 Picquigny sera pillée par les Dauphinois.
Jean 1455-1485 : épouse Yolande, fille naturelle du Duc de Bourgogne, 3 enfants
A été fait Chevalier en 1449.
En 1463 visite de la Reine ( Charlotte de Savoie ) au Château.
En 1457 il y a un Jean de Picquigny gouverneur d’Artois.
En 1467 en l’absence de Jean, le Château tombe au pouvoir des Bourguignons (avec l’aide de la Vidamesse, fille du Duc de Bourgogne).
Avec Louis XI aux états de tours, Jean participe, immédiatement après les Princes du sang.
24 Février 1470, le Duc de Bourgogne avec 5 canons prend la ville défendue par 4 à 500 archers, la ville est brûlée, le Château est pris 3 jours après. Charles le Téméraire y séjourne jusqu’au 4 Mars.
17 Septembre 1472, le Duc de Bourgogne revient camper à Picquigny.
29 Août 1475 : traité de Picquigny entre Louis XI et Edouard IV d’Angleterre sur le pont de la Somme.
Charles 1485-1522 : épouse Philippe Dame de Daours, 5 enfants.
Le 7 Juin 1493 le Roi Charles VIII couche au Château.
Antoine 1522-1548 : marié avec Marguerite de Melun, 6 enfants
Apporte ses services au Roi François Ier pendant la guerre contre Charles Quint, il est chargè de la conduite de la cavalerie.
François 1548-1560 : pas d’enfants
Pendant la guerre entre Henri II et Charles Quint il défend Metz avec François de Guise.
1553 : l’armée française campe aux environs de Picquigny.
2 Novembre 1554 les Bourguignons mettent le feu à Picquigny.
Le Vidame meurt en Angleterre ou il a été envoyé ( en service ou en otage ?) pour le Roi.
Louis 1560-1567 ( frère de François)
Il est tué à St Denis en combattant dans les rangs des calvinistes avec son frère Charles.
Philibert-Emmanuel 1567-1619 ( fils de Charles ) : 4 enfants
1595 : avec l’armée française il défend Doullens contre les Espagnols, défaite et retraite à Picquigny.
En 1569 , en son absence Antoine Gamard gouverne le château et la ville.
De fin Mars au 5 Avril 1597 Henri IV séjourne au Château avant le siège d’Amiens.
La maison d’ Albert, Ducs de Chaulnes
Charlotte-Claire-Eugénie d’Ailly 1619-1681 : se marie avec Honoré d’Albert Duc de Chaulnes, Maréchal de France, et gouverneur de Picardie en 1633. Ils auront 8 enfants.
1620 le Duc est ambassadeur de Louis XIII auprès de Jacques Stuart d’Angleterre.
1621 il commande les troupes du Roi (sièges d’Angéli et de Montauban).
1640 il ravage l’Artois et prend Arras, il est gouverneur d’Auvergne la même année.
En 1636 le Cardinal de Richelieu couche à Picquigny en allant inspecter les fortifications d’Abbeville. À cette époque c’est le Sieur de St Fuscien qui gouverne le château.
Henri-Louis 1642-1653 : Pair de France, bailli puis gouverneur d’Amiens
1670, il est gouverneur de Bretagne.
1673, il devient plénipotentiaire pour le Roi à Cologne.
1693, il est Garde des Cotes de l’Océan.
Charles (frère de Henri-Louis) 1655-1698 :
Marié en 1665 avec Elisabeth le Féron, fille de Dreu le Féron et de Barbe Servien de Montigni, il fut gouverneur de Doullens et de Rue, et effectuera 3 missions pour le Roi à Rome.
En 1689 Madame de Sévigné, amie de la Duchesse, séjourne au château.
Le Duc de Chevreuse
Charles-honoré ( neveu de Charles de Chaulnes ) 1698-1709. Marié avec la fille de Colbert, il aura 8 enfants.
Les Ducs de Chaulnes, Pairs de France, Barons de Picquigny, Vidames d’Amiens.
Louis Auguste 1709-1729 :
Marié avec Anne-Josephe de la Mosson, il fit 7 enfants. Il prend les Armes et le nom « d’Ailly » et reprend les titres des « de Chaulnes ».
Charles-François 1729-1731 :
À sa mort, son père Louis-Auguste reprend le Vidamé et s’en démet de nouveau au profit de son 3ème fils.
Michel-Ferdinand 1731-1769 :
Il crée l’école de cavalerie « Les Chevaux légers de la Garde ». Astronome et physicien, il met au point un nouveau modèle de microscope. Il sera membre honoraire de l’Académie des Sciences (en 1743). En 1752 il est Gouverneur général de Picardie.
Louis-Marie-Joseph-Romain 1769-1774 ( dernier Vidame ) :
En 1756 il était aux Chevaux Légers de la Garde dont le commandement était un héritage de famille.
En 1773 le Duc est en exil , le domaine est ruiné.
27 Avril 1774 saisie des biens, la terre de Picquigny est adjugée par voie de commande à Pierre Bryet, écuyer, sieur de Bernapré.
Revendue le 25 Avril 1775 à Liefman Calmer, grand bourgeois de La Haye.
21 Octobre 1779, revendue à Charles Philippe de Bourbon Comte d’Artois (le futur Charles X). Le vidamé disparut définitivement, un fils de France ne pouvant dépendre de l’Evêque.
À la révolution confiscation des biens, le domaine est vendu au district d’Amiens (le bois de St Pierre à Gouy fut rendu au Comte d’Artois à la restauration).
Dans le milieu du XIXe siècle, le Château ruiné et ses dépendances appartiennent à Mr Adrien de Morgan depuis 1922, par un legs de Madame de Belloy, Comtesse de la Rochefoucault, les ruines du Château appartiennent à la Société des Antiquaires de Picardie. La Collégiale et la cour de la Baye appartiennent à la commune, les jardins à des particuliers.
En 2013, la Société des antiquaires vend le château à un propriétaire privé qui s’engage à le restaurer.
Assassinat de Guillaume Duc de Normandie
17 décembre 942
En 942 le fleuve Somme marque la frontière entre le Comté de Flandre au nord, avec son Comte Arnould, et le Duché de Normandie au sud et son Duc Guillaume longue-épée deuxième Duc de Normandie.
Guillaume longue épée est un puissant allié du Roi de France Louis IV d’outremer. Arnould de son côté conspire avec d’autres Seigneurs contre le Roi. Guillaume est gênant, d’autant plus qu’il a pris le parti d’Héloin Comte de Montreuil, en l’aidant à garder son Comté que convoitait Arnould. L’idée de faire disparaître Guillaume naît dans l’esprit d’Arnould.
Il propose un rendez-vous à Guillaume, prétextant qu’il est fatigué, goutteux, et qu’il veut vivre dorénavant tranquille. Guillaume, imprudemment, accepte malgré l’avis défavorable de son entourage.
Guillaume vient dans la région d’Amiens avec une armée de normands et de bretons. De son côté Arnould arrive avec son armée dans le secteur de Corbie et propose de suite Picquigny comme lieu d’entrevue « afin que les obstacles de la rivière séparent les armées tout en permettant aux chefs de se rapprocher ».
La Somme était alors plus large, ses eaux étaient plus abondantes, il n’y avait pas de pont. D’après un texte de Dudon
« il y a là à Picquigny une île entourée d’un côté et de l’autre d’une eau profonde ».
Un autre chroniqueur Richer dit qu’à Picquigny
« la Somme est une rivière assez importante pour séparer 2 armées ».
En barque Arnould arrive le premier sur l’île, il est accompagné de 4 hommes, sans doute règle t-il les derniers détails avec ses gens qui ont juré de tuer le Duc de Normandie.
Guillaume arrive ensuite avec 12 chevaliers, il pense qu’aussi bien entouré il ne lui arrivera rien.
Plus boiteux que jamais Arnould s’approche de Guillaume et lui propose une alliance contre ses anciens alliés ! Guillaume refuse évidemment, mais il accepte un accord au sujet de l’affaire du Comté de Montreil et du Comte d’Héloin.
Après un long entretien les deux protagonistes se donnent le baiser de paix et se séparent. Arnould retourne sur la rive droite tandis qu’à l’opposé les 12 compagnons de Guillaume embarquent pour rejoindre la rive gauche, Guillaume lui, suit dans une autre barque avec son rameur.
C’est à ce moment qu’Arnould fait appeler Guillaume par les 4 conspirateurs qui lui demandent de revenir « pour s’entendre dire encore tel chose qui plus lui pléroit que rien qu’il lui eust dite« . À peine la barque touche t-elle la rive que les 4 hommes d’Arnould tirent leurs épées de dessous leurs capes et tuent Guillaume et son pilote.
Vivement les assassins traversent l’île et rejoignent Arnould et son armée. L’ordre de retraite est donné, tous s’enfuient en direction du nord traversant La Chaussée « tout droit en Flandre s’en revinrent« .
Les compagnons et soldats de Guillaume qui ont vu l’assassinat arrivent top tard auprès de lui, ils ne peuvent que constater son décès.
Remplis de douleur ils repartent vers Rouen avec la dépouille. Guillaume longue-épée 2ème Duc de Normandie sera inhumé en l’église Notre Dame.
La guerre de Cent Ans
Le traité de Picquigny
1475 est à mettre en valeur, au détriment de 1453, année de la bataille de Castillon et de la prise de Bordeaux que l’on présente parfois comme la fin de la guerre de Cent ans.
Ce traité est important puisqu’il met définitivement fin à ce conflit qu’on a appelé la guerre de Cent ans. Cette guerre a duré de 1340 à 1475 soit 135 ans. Les escarmouches, la guérilla et les véritables batailles ont au total en fait duré une bonne trentaine d’années. Le climat d’insécurité continuel a eu une importance psychologique qui a contribué à la dévastation de notre pays par l’abandon des villages toujours pillés.
Le 29 août 1475, le roi de France Louis XI et son homologue anglais Edouard IV conviennent à Picquigny d’une trêve qui met fin à 135 années de conflit entre la France et l’Angleterre dans une guerre qu’on appellera la guerre de 100 ans.
Histoire du traité de paix
Depuis 1453, les hostilités entre la France et l’Angleterre s’étaient calmées après la bataille de Castillon qui fut une victoire française, elle permit de prendre Bordeaux et de récupérer l’Aquitaine (les souverains étaient alors Charles VII pour la France et Henri VI pour l’Angleterre).
Nous sommes en 1475, le 6 juillet le nouveau roi d’Angleterre Edouard IV et son armée débarquent à Calais avec l’intention de reconquérir les domaines et provinces perdus, dont l’Aquitaine.
Il espère que son allié Charles, le Duc de Bourgogne (dit le Téméraire) se joindra à lui suivant leurs accords, mais celui-ci est « englué » en Lorraine, en essayant de réprimer une révolte.
De son côté, Louis XI ne voulant pas faire face à deux adversaires s’empresse de proposer une trêve et une alliance à Edouard IV. Les termes de l’accord sont discutés et le lieu d’une entrevue est convenu. Le choix se porte sur la Somme et la ville de Picquigny, lieu sécurisant pour les deux parties, la Somme séparant les 2 armées, et Picquigny avec son pont qui sera barré en son milieu par une forte grille.
L’entrevue s’est déroulée le 29 août 1475 par un temps pluvieux à 4 heures après diné (16 h).
Louis venant d’Amiens arrive par la rive sud, avec 60 000 hommes qui campent dans un champ au-dessus de la ville. Edouard arrive de La Chaussée, les 30 000 hommes qui l’accompagnent séjournent au dessus de La Chaussée.
Le roi de France s’avance sur le pont vêtu comme à son habitude d’un costume hétéroclite. Philippe de Commynes, Seigneur d’Argenton porte le même habit. Le roi est accompagné par le Duc de Bourbon et son frère Charles, l’Archevêque de Lyon, l’Amiral, le Maréchal Lohéac, le Seigneur de Torcy maître des arbalétriers, les Seigneurs de St Pierre et du Bouchage, Tanneguy du Chastel, l’Evêque d’Evreux et le Maire d’Amiens.
Edouard, fort bel homme, est vêtu d’une toque de velours noir orné d’une fleur de Lys en pierreries, d’un habit de drap d’or doublé de satin rouge. Tout comme Louis, Edouard est accompagné de 12 personnes, parmi lesquelles son frère Georges, le Duc de Clarence, le Comte de Northumberland, les Seigneurs de Hastings et de Howard, le Chancelier Thomas Rotherham.
Edouard approchant du milieu du pont se découvre et s’agenouille à demi, Louis lui rend son salut, les deux s’approchent, Louis passe ses bras à travers la barrière et étreint chaleureusement Edouard qui accomplit ensuite une seconde révérence.
Louis prend la parole :
« Mon Seigneur et mon cousin, vous soyez le très bien venu. Il n’y a homme au monde que je désirasse tant à voir que vous. Et loué soit Dieu de qui nous sommes ici assemblés à cette bonne intention ».
Edouard répond en assez bon français. Le Chancelier d’Angleterre apporte les pièces du traité. Les 2 souverains mettent une main sur un livre de prières et l’autre sur un reliquaire contenant un fragment de la vraie croix, ils jurent d’observer scrupuleusement leurs accords.
S’ensuit une conversation générale d’une demi-heure environ au cours de laquelle Louis a la parole bien à son entendement. Ensuite Louis demande à sa suite de se retirer afin de s’entretenir seul avec le roi d’Angleterre, la suite d’Edouard se retire également. Louis souhaite s’entretenir d’un secret traité d’amitié avec son interlocuteur.
Le soir même à Amiens le roi de France reçut à souper quelques uns des Seigneurs les plus influents d’Angleterre dont Richard le 2ème frère d’Edouard qui était opposé à la paix et auquel il fit de somptueux cadeaux.
Source : Mémoires de Philipe de Commines
Voici résumés les termes du traité :
- une trêve de sept ans est conclue,
- le roi d’Angleterre se retire de France avec son armée, et renonce à son alliance avec le Duc de Bourgogne,
- la France paiera 75 000 écus d’or et versera une pension annuelle de 50 000 écus d’or à l’Angleterre,
- les rois décident du mariage du Dauphin Charles avec la fille d’Edouard, Elisabeth,
- les souverains anglais renoncent à la couronne de France.
De ce jour, l’Angleterre ne garde en France que le port de Calais.
Picquigny et les croisades
Les croisades, ces expéditions entreprises par les Chrétiens pour délivrer les lieux saints et le Saint Sépulcre occupés par les musulmans.
Peut-être Pierre l’Ermite emmena-t-il des habitants de Picquigny lors de la 1ère croisade ? La croisade des humbles. Elle fut relayée par les nobles avec Godefroy de Bouillon qui prirent Jérusalem.
Parmi les participants picards des croisades on trouve des personnages de l’amiénois et de Picquigny en particulier.
Lors de la Première croisade – 1096 à 1145 :
- Guermond de Picquigny qui deviendra Patriarche de Jérusalem
Lors de la troisième croisade – 1188 à 1195 :
- Le Chevalier Simon de Vignacourt
- Gérard de Picquigny, avec le roi Philippe Auguste. Il meurt en Judée en 1190
- Dreu d’Amiens, châtelain d’Amiens, disparu après 1191
Lors de la cinquième croisade – 1198 à 1220 :
- Walon de Sarton chanoine de Picquigny, il ramènera la relique de Saint Jean Baptiste
- Pierre d’Amiens châtelain d’Amiens et seigneur de Vignacourt (fils de Dreu d’Amiens) parti en 1202, mort en 1204
- Bernard III de Moreuil qui rapporte « la Sainte Larme », relique vénérée dont il fit don à l’Abbaye de Selincourt
- Gui de Hautecloque (Alte-cloke à lépoque), Chevalier d’Artois (famille de Hauteclocque de la Somme). Il était accompagné de Bauduin d’Euchin, Jean de Bofles et Pierre du Châtelet. Ils avaient obtenu en Juin 1217 une lettre de crédit de Barthélémy, doyen d’Arras, qui leur permettait ainsi de disposer des fonds nécessaires à leur équipement. Ces précisions concernant Gui de Hauteclocque ont été apportées par Mr Hugues de Hauteclocque.
Lors de la sixième croisade – 1220 à 1248 :
- Adam de Sarens
Lors de la septième croisade – 1248 à 1268 :
- Guillaume de Picquigny, avec Saint Louis
Lors de la huitième croisade – 1270 :
- Les Chevaliers Jean d’Amiens, Gilles Sire de Mailly, Jean III Sire de Nesle, Mathieu Sire de Roye
La bataille de Picquigny
En ce début de l’année 1597 les Espagnols ont pris Amiens et l’occupe.
Le Roi Henri IV avec son armée marche sur la Picardie, le 22 mars il est à Picquigny, il séjourne au château de Philibert-Emmanuel jusqu’au 5 avril, puis il se rend en Artois et bataille à Arras sans succès.
Il revient dans l’amiénois et fait le siège d’Amiens en juillet et septembre.
Les Espagnols demandent une armée de secours qui arrive des Pays-Bas.
Henri IV attend l’ennemi devant Amiens, les espagnols tentent de passer au niveau D’ailly (sur Somme), ils sont repoussés et battent en retraite. 3 jours après, Amiens est libérée.
En 1595, Philibert-Emmanuel Seigneur de Picquigny avait déjà combattu avec l’armée française pour défendre Doullens contre les Espagnols. Ce fut une défaite, ils battirent en retraite et se réfugièrent à Picquigny.
A gauche la Somme, en haut à gauche Picquigny, devant Picquigny une église qui brûle. En dessous Ailly où l’on voit un affrontement sur la Somme. En bas Amiens et ses fortifications, un peu au dessus le campement de l’armée française. Au dessus encore l’armée française et ses carrés. Au dessus les Espagnols éparpillés et en fuite sur la droite.
Architecture
Dans une enceinte fortifiée d’une superficie de 15 600 m2 environ le Château est construit sur le plateau calcaire, il domine la ville et la vallée de la Somme, sa situation privilégiée et stratégique en fait une puissante place-forte.
Bâti en pierres de taille du pays il repose sur un soubassement de pavés en grès.
Le Château comprend deux parties distinctes :
La partie basse
Elle comprend la cour de la baille (3500 m2) dans laquelle se trouve la Collégiale St Martin, l’ancienne chapelle castrale.
Elle comprend aussi la basse cour de 6 000 m2 (jardins actuels), dans ce terrain il y a eu des bâtiments, peut-être des granges, écuries ou autres, il fut aussi verger et parc.
L’entrée de cette partie basse est la porte du Gard qui était fermée par une grille coulissante. L’autre entrée est l’escalier St Martin qui anciennement pouvait être fermé par une porte ou une grille. Dans la cour de la baille il y avait un puits.
La partie haute
Construite sur un terre-plein surélevé et fortifié comprenait le donjon ou corps de logis (650 m2 au sol) en équerre, flanqué de 3 grosses tours, une 4ème tour était indépendante du bâtiment principal. L’aile Est côté Collégiale comportait une porte équipée d’un pont levis. Quelques constructions annexes dans la partie Est
On accède dans cette partie haute par la barbacane, construction avancée défensive. Dans la façade de la barbacane s’ouvre une grande poterne en tiers point accostée d’une petite poterne dont la base est en plein cintre. Chacune d’elles possédait un pont levis à bascule. En passant sous le corps de logis on arrive dans la cour d’honneur (2 850 m2) dans laquelle trône un puits.
La cour du donjon communique par un pont avec le contrefort nord-ouest, ce pont surplombe la porte du Gard qui est encadrée de 2 tourelles. Dans la structure du pont il y a un logement dans lequel s’effectuait la manoeuvre de la grille qui fermait la porte du Gard (qui était d’ailleurs doublée d’une grosse porte en bois). Revenons au contre-fort nord-ouest sur lequel se trouve le pavillon dit de Sévigné, de style 17ème siècle, qui abrite le magnifique escalier qui descend à la partie basse à côté de la porte du Gard, et donne aussi l’accès au jardin (ou parc). Le dernier étage de ce pavillon sera par la suite réduit de moitié dans sa hauteur sans doute pour avoir une plus belle vue sur la vallée.
A propos de ce terre-plein fortifié de 1800 m2 un texte ancien relate « dans cette enceinte une vigne y poussait, qu’on labourait et cultivait avec soin« .
Au coin nord se trouvait une tour carrée dans laquelle un escalier à vis qu’on appelait le cornillot descendait au bas de la muraille. De là on pouvait accéder à un souterrain qui menait à la rivière prés du pont…?
Le corps de logis ou le donjon
Une belle façade en pierres et en briques côté cour. On a peu d’éléments qui décrivent la configuration intérieure du bâtiment, des modifications sont intervenues au cours des siècles, il y a eu l’incendie et le saccage de 1470 provoqué par les Bourguignons (Picquigny sera brûlée également), déjà les images du château sont assez approximatives. La courtine sud est reconstruite après 1475. Au XVIe siècle le corps de logis est reconstruit avec le style renaissance. On sait que le château possédait 15 appartements.
Il y avait 3 niveaux et un 4ème sous toit qui est assorti d’une belle rangée de fenêtres en « chien assis », donc c’est un niveau supplémentaire habitable.
Façade côté cour
Avec un passage vers la barbacane, une entrée au milieu, dans le hall le grand escalier qu’on appelait « la grande vis » d’une largeur de 2,70 m environ, un accès à gauche sur les salles basses, puis vers la droite aux cuisines. Par le grand escalier on accédait aux étages et tout en haut au beffroi qui était surmonté d’un clocheton ou se tenait le « chépier » ou guetteur, ce niveau dépassait le clocher de la Collégiale.
À chaque niveau sept grandes fenêtres et une plus petite éclairant chaque palier de l’escalier.
Aile Est
Une autre grande entrée : en face un escalier descendant aux caves, à la prison et aux souterrains. Sur la droite un passage vers la porte côté église et un escalier menant aux étages. Cette aile Est comprenait 2 niveaux.
La façade extérieure
Qui regarde Fourdrinoy est percée de 2 petites fenêtres au niveau des salles basses. Au 1er étage, 3 grandes fenêtres à meneaux croisés en pierre (munies de grilles de fer). L’une éclairait le cabinet des archives, les 2 autres la salle d’honneur. Au 2ème étage il y avait 4 grandes fenêtres. Aux tours d’angles quelques petites fenêtres.
Le rez-de-chaussée ou salles basses
D’un côté, comme nous l’avons vu plus haut, la cuisine et ses annexes, seules pièces qui subsistent aujourd’hui ; de l’autre côté il est probable que ces pièces étaient destinées aux services, officines, laveries, peut être aussi une salle des gardes.
Le 1er étage
La salle d’honneur (18 m de long), c’est là que le Seigneur recevait ses vassaux et rendait la justice, à côté, on trouve la salle des archives qui communiquait avec la tour du coin Sud. Ces grandes salles étaient couvertes par une charpente lambrissée avec entraits apparents suivant l’usage, munies de larges cheminées.
Le 2ème étage
Des appartements, chambres, antichambres, salons, cabinets. Madame de Sévigné a occupé un appartement sur ce 2ème étage prés d’un oratoire.
Le 3ème étage
Des pièces lambrissées sous combles, avec certainement des chambres pour le personnel ou autres serviteurs. Peut être y avait-il un chemin de ronde
La 4ème tour face à l’église
Elle date de la première moitié du XIVe siècle (sous Renaud), placée au dessus de la prison. Elle avait 3 ou 4 étages, elle était munie d’une dizaine de fenêtres. A part la prison on n’a pas d’informations concernant son utilité.