Le château en 3D ?

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Le premier château d’Auvers-sur-Oise : un château seigneurial

En 1222, le seigneur d’Auvers, Richard de Vernon, et son épouse Lucie continuèrent la politique de dons à l’église d’Auvers et à la chapelle Saint-Nicolas, engagée par Philippe Auguste (1165-1223). Leur fils Guillaume y restera, lui aussi, fidèle. À sa mort, en 1280, sa veuve, Alix de Meulent, reçut en douaire « le manoir de la ville d’Auvers et toutes ses appartenances ». Mais son beau-frère, Guillaume de Caletot, héritier de son mari, décida, le 30 mai 1284, d’échanger avec l’abbaye de Saint-Denis certains de ses biens, dont Auvers, contre une rente annuelle et viagère. La maison seigneuriale et un grande partie des terres revinrent alors dans le giron des religieux. Pendant la guerre de Cent Ans, le Vexin fut, à plusieurs reprises, attaqué par les Anglais. Pour éviter que les bâtiments fortifiés ne tombent aux mains de l’ennemi, le gouverneur militaire de Pontoise, Gasce de Bouconvilliers, fit raser la totalité des forteresses de la région. Tout porte à croire que le premier château bâti à Auvers subit le sort commun. En 1419, l’ensemble de la région était encore sous domination anglaise. Il fallut attendre 1441 pour que les Français imposent de nouveau leur suprématie.

Cadastre napoléonien d’Auvers-sur-Oise, 1973. Archives départementales du Val-d’Oise.

Après un siècle de calme relatif, la région sombra de nouveau dans le désordre et les exactions en tous genres pendant les guerres de religion. La ville voisine de Pontoise ayant pris parti pour la Ligue fut assiégée par Henri III et Henri de Navarre. La fortune des armes étant versatile, la cité changea à plusieurs reprises de camp entre 1589 et 1592. Auvers fut la proie des soldats et des mercenaires des deux factions. Le 3 juin 1599, pour la somme de 6000 écus d’or, la terre d’Auvers fut cédée à un gentilhomme bourguignon, Jean-François de Berbisy (1545-1632) qui cherchait à s’installer dans la région à cause de ses fonctions. Charles IX (1550-1574) l’avait nommé chevalier de l’ordre du Roi en 1572, ainsi que bailli et gouverneur de Crépy-en-Valois, à 70 km environ d’Auvers.

En 1595, une nouvelle charge de maître d’hôtel ordinaire du roi sous Henri IV conforta sa fortune. Il acquit alors les seigneuries d’Hérouville et de Veniers-sous-Loudun (intégrée à Loudun en 1964). Auvers conserva toutefois sa préférence. Pour agrandir son domaine, il acheta tout ce qu’il était possible autour de son logis situé à proximité de l’église. C’est là qu’il mourut le 4 décembre 1632, avant d’être inhumé dans le sanctuaire du village. En 1615, alors que des troubles persistaient encore, Jean-François de Berbisy, le prieur et certains habitants d’Auvers décidèrent de continuer la fortification « depuis longtemps commencée, de l’église et du cimetière, le tout joint à l’hôtel seigneurial, pour former une retraite aux habitants contre lesdites courses et y enfermer enfants, bestiaux, grains et autres commodités ». Le premier château d’Auvers, endommagé ou détruit pendant la guerre de Cent Ans, avait donc été restauré ou reconstruit, sans doute sous le règne de François Ier ou d’Henri II.

En 1632, Étienne de Berbisy succéda à son père, mais l’héritage se révéla assez modeste et le logis seigneurial situé au coeur du village « était plutôt une ferme qu’un château ». Plus imbu de ses prérogatives que son père, Berbisy passa son existence en chicanes au sujet de ses droits seigneuriaux. À sa mort, en 1660, son épouse préféra renoncer à la succession et laissa ses enfants se déchirer pour celle-ci. Après six années de querelle, faute d’accord, les héritiers furent contraints de vendre le domaine. L’abbaye de Saint-Denis se porta de nouveau acquéreur de l’ensemble. Mais la discorde régnait dans la vénérable institution. L’abbé, Jean François Paul de Gondi (1613-1679), archevêque de Paris et cardinal de Retz, menait grand train. Pour protéger leurs revenus, les moines lui demandèrent rapidement des comptes. Un partage des biens fut finalisé en 1672. En 1679, à la mort de l’abbé, Louis XIV transféra sa part aux Dames de Saint-Cyr, protégées de Mme de Maintenon (1635-1719). Les « Dames », chargées de l’éducation des jeunes filles de la noblesse peu argentée, se retrouvèrent rapidement à la tête d’un patrimoine considérable. Pendant un siècle, leur gestion fut irréprochable. En 1779, elles durent s’incliner devant les passions cynégétiques des princes de Conti. Les passions étant, par nature, éphémères, le dernier prince revendit, quatre ans plus tard, le domaine au comte de Provence, futur Louis XVIII (1755-1824). Après son émigration, le 20 juin 1791, jour de la fuite à Varennes, la seigneurie fut vendue comme bien d’émigré et devint la propriété de Jean-Baptiste Javon. En 1829, la fille de celui-ci céda l’ensemble à un certain louis Pinot. Dans les années 1880, le logis appartenait à la famille Mesny, puis, en 1885, à M. Babille.

Le manoir, d’un aspect modeste, très endommagé au début du XXe siècle, laissa derrière lui quelques bâtiments de ferme et des débris épars de fortifications encore visibles aujourd’hui.

L’orangerie en 1977. Archives départementales du Val-d’Oise.

La façade sud en 1988. Archives départementales du Val-d’Oise. Photo : Charles Maj.

Le nouveau château d'Auvers : château de Leyrit

Construction du château : 1630-1635

La construction la plus ambitieuse fut l’oeuvre d’un banquier italien appelé Zanobi Lioni (parfois orthographié Zenobi Leoni). Sans doute venu en France avec l’importante colonie italienne gravitant autour de Marie de Médicis (1575-1642), ce personnage occupait un poste important à la cour. En décembre 1619, ses premiers achats connus à Auvers mentionnent qu’il est « écuyer, secrétaire de la reine et sieur de Thibaut Roussel », fief situé à Livilliers, à quelques kilomètres d’Auvers. Pendant plus de trente ans, Lioni, dont la résidence principale se trouvait rue de Montmorency, à Paris, poursuivra une politique d’acquisition ambitieuse qui fera de lui l’un des principaux propriétaires fonciers du pays. Jusqu’en 1654, il acheta ainsi de nombreuses pièces de terre, dont le clos Pinot (1640) « entouré de haies vives » et, surtout, peu éloigné de celui-ci, une propriété « entourée de murs contiguë au fief de Valembourg » appartenant à un certain Jean Thomé, avocat en Parlement. Achetée en novembre 1623, peu après la mort de son propriétaire, elle permettra à Lioni de construire, entre 1630 et 1635, « un petit pavillon avec toit en terrasse, à la mode italienne ». Dès cette date, le bâtiment possédait un concierge nommé Pierre Garot et un cocher appelé Sébastien Pasquier. En 1643, un contrat fut passé avec Simon Prévost pour l’entretien des jardins. Contre 200 livres tournois, le jardinier, logé dans un pavillon situé à proximité du château, s’engageait « à tenir en bon état les deux jardins potagers, tant celui du haut que celui du bas, entretenir les palissades, tondre les haies, nettoyer les allées, tant desdits potagers que du bois vert, soigner les parterres… ».

D’après certains actes, on peut déduire que Zanobi Lioni avait épousé en 1620 Louise Manowelly, fille d’un maître des Eaux et Forêts installé à Buchy en Seine-Maritime, à une centaine de kilomètres d’Auvers. De ce mariage naquit une enfant prénommée Marie, dont l’union avec Antoine II de Saint-Chamans, seigneur de Méry, le 9 mai 1655, était appelée à conforter l’influence et l’implantation de son père dans la région. Mais un acte passé devant le Parlement, le 28 août de la même année, nous apprend qu’un bourgeois de Paris nommé Guillaume Ange s’était rendu adjudicataire de l’ensemble des biens du banquier italien. Zanobi Lioni était donc mort entre-temps.

Quatre ans plus tard, la succession n’était toujours pas réglée, puisque au mois d’août 1660, le représentant des créanciers, Henri Mahieux, habitait le château. Les héritiers légitimes semblent avoir renoncé à faire valoir leurs droits. Parmi les requérants se trouve l’évêque d’Agen, monseigneur d’Elbène ; Léon de Balzac d’Entragues, le seigneur de Marcoussis ; le philosophe et théologien Nicolas Malebranche (1638-1715), secrétaire du roi depuis 1658 ; Nicolas Philippe, qualifié de maître d’hôtel, enfin deux personnes nommées Petit et Rabouin.

Changement de propriétaire : 1668

En 1668, les créanciers eurent enfin gain de cause et le château fut vendu à Jean de Leyrit (orthographié parfois Léry ou L’Héry). Le nouveau propriétaire possédait un certain prestige. La régence d’Anne d’Autriche (1643-1651) lui avait octroyé, en 1651, les titres de « conseiller, maître d’hôtel du roi, président-trésorier de France et général des Finances ». Ce dernier titre lui fut garanti, sa vie durant, par brevet de Louis XIV en juillet 1677, marque de la haute estime dans laquelle le tenait le Roi-Soleil. L’acte de vente du domaine stipule qu’il s’agit d' »une grande maison, plusieurs bâtiments, cour, basse-cour, jardin haut, d’une contenance de 6 arp. ou environ, dans lequel on a entrée de ladite maison au moyen d’un pont en pierre à arcade qui passe par-dessus la grande rue dudit Auvers, contenant 11 à 12 arpents ; une autre grande cour basse tenant audit jardin bas, qui a son entrée dans la grande rue ; une petite maison servant au jardinier et dont l’entrée est rue Roger ».

La description du bâtiment qui nous intéresse au premier chef est sensiblement différente de celle citée plus haut. Il ne s’agit plus d’un « petit pavillon avec toit en terrasse », mais d' »une grande maison » sans plus de détails.

À l’instar de Lioni, Jean de Leyrit mena une très active politique d’acquisition. Jusqu’à sa mort, il agrandit sans cesse son domaine. Décédé dans sa propriété d’Auvers le 23 août 1692, il fut inhumé, comme les Berbisy avant lui, dans le choeur de l’église. Après plusieurs années de procédure, le château échut à sa soeur Anne, veuve de messire Jacques de Bénard, gentilhomme ordinaire de la chambre du roi, solidement implanté en Normandie. Celle-ci habita la demeure, où elle accueillit même sa fille ainée, Anne, épouse de François d’Aigremont, seigneur de Banneville, colonel du régiment de Torigny. C’est à Auvers que cette dernière mourut avant d’être enterrée dans l’église, le 6 octobre 1708, à l’âge de 37 ans. En 1718, un acte notarié atteste qu’Anne de Bénard était encore très active pour agrandir son patrimoine, et Henri Mataigne suppose qu’elle vendit le château de son vivant à la famille d’Espréménil en mai 1720, pour se rapprocher de son fils et de sa fille cadette.

Le château de Leyrit sous les d'Espréménil

Le nouveau propriétaire, Jacques Duval d’Espréménil (1672-1748), était directeur général de la Compagnie des Indes. Entre 1720 et 1730, il résida surtout à Pondichéry. Nommé gouverneur de Lorient de 1731 à 1738, il demeura essentiellement dans cette ville au cours de cette période. Marié en mars 1712 avec Élisabeth Bouilling, il eut trois filles et quatre garçons. Ces derniers nous intéressent tout particulièrement, car ils furent, presque tous, partie prenante dans l’histoire du château. Dans la dernière partie de sa vie, Jacques Duval d’Espréménil dut partager son temps entre Auvers, sa résidence de campagne, et Paris, où il mourut le 22 février 1748. Georges, son deuxième fils, né en 1716, hérita du domaine et marcha sur les traces de son père.

En 1741, il fut nommé conseiller au Conseil souverain de Pondichéry, puis directeur de l’établissement de Mahé l’année suivante. Président du Conseil supérieur de Pondichéry, il devint, le 14 mars 1756, « commandant général pour cinq années des établissements français aux Indes orientales ». Ce dernier poste fut d’autant plus sensible que la guerre de Sept Ans (1756-1763) commença peu après sa nomination. Duval organisa alors la défense de Pondichéry et des autres comptoirs français face à la menace anglaise. l’arrivée, le 29 avril 1758, du lieutenant-général Lally-Tollendal (1702-1766) avec des renforts permit tous les espoirs. Mais l’arrogance du personnage, sa mésentente avec ses subordonnés et l’administration locale se révélèrent fatales aux intérêts français. Le 14 janvier 1761, Lally-Tollendal se vit contraint à la capitulation. Il imputa cependant à Duval et au Conseil supérieur les responsabilités de la défaite. Duval mourut le 10 avril 1764. Post-mortem, raison lui sera rendue, car après deux ans de procès, Lally-Tollendal fut reconnu coupable et condamné à mort en mai 1766. À cause de ses multiples activités, Georges Duval eut-il le temps et la disponibilité d’esprit pour apporter des modifications dans sa maison d’Auvers ? Henri Mataigne nous indique que le bâtiment avait eu à souffrir de l’absence des différents propriétaires depuis la mort de Jean de Leyrit. Sa fille Anne, malgré de fréquents séjours dans le village, aurait surtout résidé à Maisons, en Normandie. Jacques et Georges d’Espréménil furent également peu présents sur les lieux, même si ce dernier fut presque constamment remplacé par son frère. Pour Mataigne, « Georges Duval n’avait été que le propriétaire nominal du château : c’est au nom de son frère Michel Archange Duval Dumanoir que furent passés tous les contrats ».

Le château de Leyrit sous les princes de Conti

Louis-François, sixième prince de Conti (1716-1776), appartenait à une maison prestigieuse. Issue d’une branche cadette de la maison de Condé, elle-même branche cadette de celle des Bourbons, ses membres étaient cousins des rois de France et portaient le titre de « prince du sang ». Leur fortune était immense. Les Conti possédaient des biens prestigieux à Paris et dans la plupart des provinces françaises, en particulier au nord de la capitale, autour de l’Isle-Adam. L’achat du château de Leyrit s’inscrivait dans une politique d’acquisition plus ambitieuse où la politique tout court se mêlait aux agréments cynégétiques. Héritiers de la principauté d’Orange, que les rois de France, pour des raisons stratégiques, voulaient faire entrer dans le giron royal, les Conti acceptèrent le principe d’un échange, qui traîna passablement en longueur et s’échelonna sous plusieurs règnes. Il est possible de supposer qu’à cause de cela, ils se permirent beaucoup de liberté sur les terres de la région. Comme la plupart de ses prédécesseurs et comme son fils après lui, Louis-François vouait une passion effrénée à la chasse. À ce titre, ses domaines n’étaient jamais assez grands et Auvers, incrustée « entre ses possessions de Pontoise et de Beaumont » se révéla « une barrière aux plaisirs du prince ». Toutefois, cet obstacle n’embarrassait guère les différents princes, qui y chassaient tout à loisir, selon plusieurs témoignages de l’époque. Cette passion devait les mettre en conflit avec le « seigneur » d’Auvers, en l’occurence les Dames de Saint-Cyr. Il fallut donc composer et, après moult tractations, l’échange put avoir lieu. Engagé sous Louis XV, il fut définitivement finalisé le 2 mai 1779, sous le règne de Louis XVI, il fut définitivement finalisé le 2 mai 1779, sous le règne de Louis XVI, avec Louis-François-Joseph, septième prince de Conti (1734-1814), qui avait fait du château de l’Isle-Adam sa résidence de chasse favorite.

Le rêve cygénétique de ses prédécesseurs tourna court très vite. Celui qui devait être le dernier de sa lignée vendit en effet sa résidence d’Auvers le 24 septembre 1779. Il céda ensuite la seigneurie nouvellement acquise en octobre 1783. Monsieur, frère du roi, devint le nouveau et ultime seigneur de la paroisse. Le passage à Auvers de ces hôtes très prestigieux n’a finalement laissé que peu de vestiges. La tradition rapporte qu’une grotte artificielle en forme de dôme servait de laiterie. Elle était agrémentée d’un jet d’eau et ses parois recouvertes de coquillages laissent apparaître le monogramme des Conti. Mais il est fort probable que le nymphée – espace dédié aux nymphes, ce qui remettrait en cause l’identification moderne de « laiterie » – a été construit par Zanobi Lioni, les Conti n’y apportant qu’une légère retouche. Une autre construction, partiellement enterrée à une époque indéterminée, aurait pu servir de cachot, tandis que la salle d’en face, où subsiste une cheminée, pourrait être identifiée à une salle de garde.

Du château de Leyrit au château d'Auvers

Le château de Leyrit entra alors dans une période chaotique où les propriétaires se multiplièrent dans un laps de temps très court. Contre 27 000 livres et 10 livres de cens, la maison fut vendue à un ancien officier de dragons, Nicolas-François Denier de La Belleourie. L’acte de vente donne une description, encore une fois, très sommaire de l’ensemble « bâtiment, écuries, remises, maison de jardinier, cour, basse-cour, parterres et autres, une grange et une masure attenant au potager, un verger et une ancienne pépinière, un parc planté de 3 arpents 1/2, une terrasse avec avenue, et un petit bois hors du parc avec avenue de tilleuls ».

Quelques mois plus tard, le nouvel acheteur s’adjoignit deux associés nommés Lescouriou et Delépine. En 1781, Denier vendit les parts qui lui restaient à ses copropriétaires. En avril 1787, Delépine céda la moitié qui lui appartenait M. de La Brosse. Enfin, le 25 juillet de la même année, l’ensemble passa entre les mains de Louis-Claude Chéron de La Bruyère.

Après cette période de spéculation et de turbulences, le domaine retrouva un certain calme et resta la propriété d’une même famille pendant près d’un siècle.

Informations utiles

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Tel: 01 34 48 48 45

https://www.chateau-auvers.fr

Chemin des berthelées (parking), 95430 Auvers-sur-Oise