Le château en 3D ?

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Depuis la préhistoire, la Dordogne est une voie de communication importante et ses rivages ont connu très tôt des implantations humaines. Au Moyen Âge surtout, les villages se blottissent en dessous du château protecteur. Le tissu féodal se tresse au fil des méandres de la rivière, laissant aujourd’hui un patrimoine d’un intérêt exceptionnel. C’est à 10 km au sud de Sarlat, au coeur du Périgord Noir, que ce patrimoine est le plus dense. Là, entre la bastide de Domme et le bourg médiéval de Beynac, le château de Castelnaud dresse sa silhouette majestueuse. Castelnaud, le « château neuf », semble tourner le dos à la rivière mais, pourtant, il la surveille. À la tête de son promontoire, le donjon contrôle la confluence de la Dordogne et du Céou venu du sud. Du côté du nord, il observe son rival Beynac tandis qu’à ses pieds s’étire le village aux ruelles escarpées.

Castelnaud est un château fort qui garde aujourd’hui nombre de mystères. Son histoire, à l’image de celle de la région, fut particulièrement mouvementée.

L’histoire de Castelnaud débute au XIIe siècle. À cette époque, le château que l’on connaît aujourd’hui n’existe pas encore. Des textes d’archives mentionnent dès 1115 le lignage d’une famille de Castelnaud mais rien ne permet de préciser l’existence d’un château. La date de construction du premier château est donc hypothétique, tout comme l’existence d’une ancienne chapelle que nous rapporte un témoignage du XIXe siècle. Ni l’archéologie ni les sources écrites ne peuvent attester avec certitude qu’il y ait eu des constructions sur ‘assiette rocheuse au XIIe siècle. Pourtant, alors que le château n’existe peut-être pas encore, son histoire se joue en 1152. Aliénor, duchesse d’Aquitaine, épouse en seconde noces le duc d’Anjou Henri Plantagenêt qui, deux ans plus tard, devient roi d’Angleterre. Ce mariage va conditionner trois longs siècles de l’histoire du Sud-Ouest dans laquelle Castelnaud est partie prenante.

Le premier château

Castelnaud entre dans l’histoire en 1214, par un fait d’armes spectaculaire. le château est alors à la tête d’une seigneurie dont le territoire s’étend vers l’ouest et le sud sur une quinzaine de kilomètres. Au nord de ce périmètre, la Dordogne marque la frontière avec les terres des barons de Beynac. Le maître des lieux, Bernard de Casnac, est un seigneur puissant, également en possession de places voisines sur la Dordogne : Domme, Aillac, Montfort. Par son mariage avec Alix de Turenne, il devient le beau-frère des vicomtes de Turenne, de Comborn et de Ventadour, trois hauts seigneurs limousins. Les chroniqueurs présentent Bernard de Casnac comme un personnage haut en couleur. Fervent et féroce défenseur de la foi cathare, il est réputé pour sa cruauté envers les chrétiens qui tombent sous sa main : « Il leur coupoit piedz et mains et leur crevoit les yeux ou les faisoit mourir et sa femme exercoit mesmes cruautés envers les femmes auxquelles elle fasoit couper les mameles et le poulce des mains… ». Voilà pourquoi Simon de Montfort se présente devant le château de Castelnaud en 1214. Ce chevalier venu du Nord est à la tête de la croisade contre les Albigeois, autre dénomination des Cathares.

Mais la défense de la foi n’est sans doute qu’un prétexte car Bernard de Casnac est un des appuis les plus puissants du comte de Toulouse dans la région. Or, si la croisade prêchée par le pape Innocent III a un but religieux, celui de ramener les hérétiques dans le droit chemin, elle a aussi un but politique inavoué : mettre sous la coupe royale le comté de Toulouse. Simon de Montfort prend successivement les forteresses de Montfort, Domme, Castelnaud et Beynac. Pour autant, Castelnaud n’est pas détruit puisque Simon y installe une garnison. L’année suivante, en 1215, Bernard de Casnac revient sur les lieux. Il surprend le gouverneur de Simon et procède à la pendaison de toute la garnison.

Revanche de courte durée, puisque la même année, l’archevêque de Bordeaux, parti également en croisade, chasse définitivement les hérétiques et brûle le  château. Seules quelques pierres rougies par le feu et réemployées plus tard témoignent peut-être de ces épiques combats, mais il ne reste rien du premier château pris par Simon de Montfort. Sans doute existait-il déjà un premier donjon avec une enceinte et un corps de logis. Quoi qu’il en soit, le château est désormais sous la domination royale. En 1240, à Compiègne, Aymeric de Castelnaud, héritier de Bernard de Casnac, s’agenouille devant Saint Louis et lui jure fidélité. Mais en 1259, le traité de Paris modifie le contexte politique de la région.

Signé entre Saint Louis pour la France et Henri III pour l’Angleterre, ce traité tente de mettre un terme au conflit larvé entre les Capétiens et les Plantagenêts. Saint Louis restitue à Henri III de nombreux territoires aquitains dont le Périgord. Le roi d’Angleterre-duc d’Aquitaine a la jouissance de ces territoires mais il devient le vassal du roi de France. Voilà un cas de figure peu banal : deux rois pour un seul royaume dont un est le vassal de l’autre et de surcroît plus puissant que son suzerain. Cette situation d’abord acceptable deviendra vite humiliante pour le roi-duc et aboutira à la guerre de Cent Ans. Castelnaud est loin de toutes ces querelles dynastiques mais il est pourtant concerné : en 1259, le château passe sous domination anglaise. Bernard de Cardaillac, sénéchal du roi-duc, est le premier maître des lieux anglais ; Jean de Lalinde, maréchal, lui succède. Mais les Anglais ne resteront pas longtemps : en ce temps-là, les luttes d’influence constantes rendent les fiefs mouvants ; en 1273, la terre revient à la lignée féodale légitime, celle des Castelnaud. Ils prêtent hommage au comte du Périgord, vassal du roi de France.

C’est au cours du XIIIe siècle que l’on a reconstruit et renforcé le château de Castelnaud. Deux éléments de cette époque sont conservés : le donjon carré et la courtine percée d’archères formant un éperon vers le nord. une récente étude archéologique a permis de déterminer plusieurs campagnes de construction qui s’étalent de 1218 à 1262 et une dernière au début du XIVe siècle pour la partie sommitale du donjon. Mais le château du XIIIe siècle ne se résumait pas à ces seules constructions. La porte d’entrée ouverte dans la courtine était protégée par une barbacane qui a été remplacée par une autre barbacane au XVe siècle que l’on peut encore admirer de nos jours. Le mur est du corps de logis, à l’aplomb de la Dordogne, date également du XIIIe siècle.

Un château puissant !

La fin du XIIIe siècle inaugure pour Castelnaud une période de prospérité et de calme relatif. L’hommage répété aux comtes du Périgord jusqu’au début de la guerre de Cent Ans assure une grande stabilité au château malgré quelques conflits successoraux. Au début du XIVe siècle, Castelnaud s’impose comme l’une des principales puissances du Périgord. Preuve en est le nombre de chevaliers dont il dispose. En 1302, le roi Philippe le Bel lève une armée pour mener la guerre de Flandres. Le comte du Périgord apportera vingt hommes à la convocation de l’ost féodal ; Raoul et Mainfroy de Castelnaud, coseigneurs, dix hommes chacun. Mais la puissance militaire de Castelnaud et sa situation stratégique inquiètent sérieusement le voisinage.

Durant toute cette période, les barons de Beynac sont en conflit quasi permanent avec les seigneurs de Castelnaud. Sans cesse les deux maisons rivales se disputent le contrôle de la région, entraînant avec elles une partie de la noblesse périgourdine divisée entre ces deux camps. Les deux châteaux s’observent, s’espionnent ; chacun guette la faute de l’autre ou son ultime provocation… Mais jamais le choc frontal n’aura lieu, chacune des deux puissances craignant trop la force de l’autre pour engager un conflit armé qui aurait mis toute la région à feu et à sang. Il faut dire que de prestigieux médiateurs se sont succédé pour éviter le pire. Ainsi, en 1317, c’est le pape lui-même, Jean XXII, qui autorise un mariage entre les deux familles pour tenter de mettre un terme à ce conflit endémique.

Ce contexte de guerre privée, si fréquent au Moyen Âge, sera bientôt relégué au second rang : la menace qui planait sur l’Europe se fait de plus en plus pressante et en 1337 éclate la guerre de Cent Ans.

Sept fois anglais !

Les premières décennies sont plutôt favorables aux Anglais. Après quelques escarmouches et des négociations, la première grande bataille est celle de Crécy en 1346 où la fine fleur de la noblesse française est totalement décimée par les archers anglais.

Dix ans plus tard, à Poitiers, le roi Jean le Bon est fait prisonnier tandis que la peste noire étend son manteau sur l’Occident, entraînant dans la mort un tiers de la population européenne. La France est au plus mal lorsque le traité de Brétigny-Calais est signé en 1360. Ce traité libère le roi de France mais cède aux Anglais la grande Aquitaine désormais gouvernée par le redoutable Prince Noir. Le château de Castelnaud est donc une nouvelle fois aux mains des Anglais lorsque Magne de Castelnaud, unique héritière de la famille, épouse, le 26 novembre 1368, le seigneur agenais Nompar de Caumont. Il s’agit d’un événement important dans l’histoire du château puisque la famille de Caumont en sera propriétaire jusqu’à la Révolution.

Pendant la guerre, Les Caumont sont souvent dans le camp anglais. En 1399, le roi d’Angleterre nomme Nompar de Caumont son sénéchal pour l’Agenais. Cette situation relancera de plus belle le conflit avec les seigneurs de Beynac, plutôt favorables aux Français. Mais sur le terrain les choses ne sont pas si simples. Sur fond de guerre internationale et de querelles intestines, le château de Castelnaud est sans cesse ballotté d’un camp à l’autre dans la première moitié du XVe siècle. L’histoire de cette période est la parfaite illustration de l’opportunisme des chefs de guerre qui n’hésitent pas à trahir quand une situation devient trop compromettante. À Castelnaud, ces hommes sans scrupules se nomment Archambaud et Bertrand d’Abzac : en 1405, le château est pris par la force pour le compte du roi d’Angleterre. Archambaud et d’Abzac, qui en est le capitaine, le vend aux Français pour 6000 écus d’or et le reprend par surprise en 1407. Les deux hommes multiplient les incursions et coups de main dans les alentours et en 1415 on retrouve Bertrand d’Abzac prêtant serment au roi de France. Deux ans plus tard, en 1417, Bertrand est toujours capitaine de Castelnaud mais il est passé à l’Angleterre. En 1419, le château revient à la France puis à l’Angleterre en 1420. Pendant ce temps, les seigneurs de Caumont, légitimes propriétaires, se battent le plus souvent pour l’Angleterre dans leur province agenaise ; la ville de Sarlat, française depuis toujours, signe trêve sur trêve avec les capitaines anglais de Castelnaud. Les Français échoueront devant le château en 1430 mais réussiront à l’enlever en 1437. Les Anglais reviennent pourtant une dernière fois en 1440. Mais en 1442, lassé de la mainmise anglaise sur Castelnaud, le roi de France en personne ordonne que le siège soit mis devant les remparts.

Cette fois, les choses sont sérieuses et les Français viennent en force : le comte de Périgord est là, appuyé par les seigneurs de Ventadour, de Turenne, de Castelnau-Bretenoux, de Traignac et bien sûr de Beynac. Les bourgeois de Sarlat prêtent de l’argent et deux machines de guerre, une bride et un loup. Le lourd convoi se prépare lentement, les soldats fourbissent leurs armes et le 7 octobre 1442, plusieurs centaines d’hommes se présentent au pied des murailles ennemies. Le siège dure trois semaines. Les Français, trop nombreux et trop forts, ne laissent aucune chance au capitaine anglais Pascal de Theil qui donne les clefs du château contre la vie sauve et 400 écus. Ce siège d’octobre 1442 est la dernière action militaire retentissante. Les Anglais sont définitivement chassés de Castelnaud et onze ans plus tard, ils quittent le sol français après la bataille de Castillon qui marqua la fin des conflits de la guerre de Cent Ans en attendant la signature officielle du traité de Picquigny.

Le siège d'octobre 1442

L’ordonnance royale à l’origine du siège de Castelnaud en octobre 1442 est conservée aux archives de Pau. Le château tenu par les Anglais est alors dénommé Castelnau de Berbiguière… « Nous Charles, par la grâce de Dieu roi de France, salut ! Ne pouvant en notre personne mettre en notre obéissance nos villes de Bergerac, Castelnau de Berbiguière, et plusieurs autres places que tiennent nos anciens ennemis et adversaires les Anglais, donnons pouvoir par les présentes à nos chers amis chevaliers et chambellans le comte de Penthièvre, le vicomte de Turenne, le comte de Ventadour et les sires de Castelnau de Bretenoux, de Treignac et de Beynac. Pour faire assembler toute manière de gens et faire aller vivres, artillerie, manoeuvres, charpentiers, maçons en les payant raisonnablement, afin de mettre siège aux dites places et les remettre en notre obéissance ».

Informations utiles

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Tel: 05 53 31 30 00

http://www.castelnaud.com

24250 Castelnaud-la-Chapelle