Le prieuré en 3D ?

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Son histoire

Aucun acte original de fondation n’ayant été conservé, seul le Nécrologe de l’abbaye de Saint-Denis en France rédigé en 1760 fait remonter la fondation du prieuré de Sainte-Gauburge à 1006. S’il subsiste des incertitudes sur cette date, il semble avéré que c’est le seigneur de Bellême, Guillaume 1er dit Talvas, qui confia ce « petit lieu » (locellus) à Bérenger moine de l’abbaye bénédictine de Saint-Florentin de Bonneval entre 1018 et 1033.

Cette période est marquée par le morcellement territorial et la dislocation des cadres administratifs du royaume Franc (fin IXe – seconde moitié du XIe siècle), ce qui peut expliquer les motivations de cette création. Situé dans la partie est de la seigneurie de Bellême, le prieuré se trouve dans une région de partage d’influence. Son implantation a pu être pensée comme une délimitation de zone de pouvoir.

Le cartulaire de l’abbaye de Saint-Père-en-Vallée de Chartres relate que Bérenger, « ne supportant la fréquence des guerres et la pauvreté du lieu, regagna volontairement son monastère » de Bonneval. Yves, frère de Guillaume Talvas, le confie alors à Saint-Père-de-Chartres, qui envoie quelques moines à Sainte-Gauburge, sous la direction de Deodat. Trois ans plus tard, la communauté est réintégrée à Chartres, en raison de la conduite scandaleuse de Deodat.

Avant 1124, le prieuré est remis à l’Abbaye royale de Saint-Denis-en-France, dont Suger, proche du roi Louis VI, est le père abbé depuis 1122. Homme d’Église et d’État, Suger est à l’origine du renouveau spirituel et architectural de l’abbaye.

Grâce à ce rattachement prestigieux, le prieuré est élevé au rang de châtellenie, obtient les droits de sceaux, de marques et mesures et les droits d’appel au Parlement de Paris. Les dons affluent et sa situation s’améliore.

La communauté des moines est très difficile à saisir. Leur nombre ne semble pas excéder six dans les périodes les plus fastes.

Concernant la vie monacale, les visites épiscopales d’Eudes Rigaud (1250) fournissent quelques informations : certains aspects de la Règle de Saint-Benoît ne sont pas respectés. Les vêtements sont jugés trop luxueux, l’alimentation trop riche en viande. Il importe de nuancer ces propos, les visites épiscopales ayant principalement pour but de mettre en lumière les manquements des communautés inspectées.

Au XVe siècle, le système de la commende est installé : le roi nomme le prieur. Il subsiste très peu de documents pour cette période. La commende engendre le népotisme, des dynasties de prieures s’installent. C’est le cas notamment des familles Croquet et Abot, dont les membres se succèdent à la tête du prieuré du XVe à la fin du XVIIe siècle.

Au XVIIIe siècle, de jeunes pensionnaires nobles et bourgeois suivent les enseignements dispensés par les moines, comme l’attestent les registres paroissiaux de Sainte-Gauburge. En 1791, les biens du prieuré sont vendus comme Biens Nationaux et échoient à Alexandre Brillon. En 1825, Jean Thibault issu d’une lignée de fermiers généraux installés au prieuré, acquiert le domaine.

Sainte-Gauburge

Le prieuré de Sainte-Gauburge doit son nom à Walburge. Née vers 710 en Angleterre, elle est placée en 720 avec sa mère au monastère de femmes de Wimborne, dans le Dorset, où elle sera élevée.

En 748, Walburge et d’autres religieuses sont envoyées en Germanie à la demande de Boniface, dont elle est parente. Après avoir passé deux ans à Bischofsheim, elle rejoint son frère Wunibald au monastère d’Heidenheim. Il semble qu’ils travaillent à la création d’une communauté féminine dans ce même monastère, le transformant en monastère double d’hommes et de femmes. À la mort de son frère, en 761, elle prend la direction des deux communautés, et la conservera jusqu’à sa mort le 25 février 779.

En 870, son corps, précédemment inhumé à Heidenheim, est transféré à Eichstatt, dont les évêques propagent le culte. L’église dans laquelle sont conservées ses reliques, prend son nom. Cette translation solennelle des reliques de Walburge, suivie de deux autres, équivaut à sa canonisation.

Comment arrivera-t-elle dans le Perche ? La question reste ouverte. Cette zone frontière était un enjeu politique et religieux, politique car en zone de marche (frontière)entre la Normandie et le Maine, religieux car cette zone densément boisée conservait certainement de fortes survivances de paganisme. La Pierre Procureuse située non loin dans l’actuelle forêt de Gémages en témoigne. Seul vestige d’un ensemble plus vaste, elle atteste que le secteur était un lieu sacré.

Le choix de Sainte Gauburge n’aurait alors rien d’anodin. Cette dernière, très populaire dès le Moyen Âge, est fêtée le 1er mai, et il est intéressant de noter qu’il s’agit également de l’ancienne fête du Printemps (nuit de Walpurgis). Cette sainte aurait alors constitué en quelque sorte une transition entre les anciennes croyances et le christianisme, légitimant ainsi l’implantation d’un établissement religieux.

La piété populaire lui attribue de nombreux miracles parmi lesquels :

  • L’enfant malade : La fille d’un châtelain étant gravement malade, Walburge sortit seule du monastère pour se rendre au château. La meute de chiens du seigneur se précipita sur elle, mais ne lui fit aucun mal. Elle veilla la jeune fille toute la nuit et le lendemain cette dernière était guérie. Dès lors elle fut invoquée pour la guérison des enfants malades, et ce miracle fut repris dans l’iconographie de la sainte.
  • L’huile de Sainte-Gauburge : De son tombeau, aurait suinté une huile ayant la faculté de guérir de très nombreuses maladies comme la peste, les maladies utérines et oculaires. Les apothicaires en ont fait leur sainte patronne, ce dont la tour du logis des moines du prieuré de Sainte-Gauburge se fait l’écho.

Architecture

Outre l’église prieurale, le prieuré regroupe le logis du prieur, le logis des moines et quelques bâtiments d’exploitation.

L'église

Église prieurale et paroissiale jusqu’à la Révolution française. Église paroissiale de 1791 à 1812. À cette date, la commune de Sainte-Gauburge devient un hameau. En 1818, la commune de Saint-Cyr-la-Rosière la transforme en chapelle oratoire.

En 1903, classement au titre des Monuments Historiques. L’architecture en est composite en raison du chevauchement des constructions en calcaire extrait d’une carrière située à proximité du site et fermée au début du XIXe siècle.

L’intérieur

L’église adopte un plan basilical orienté : une nef de cinq travées, sans collatéraux, prolongée par un choeur de trois travées fermé par un mur de chevet à trois pans. Sur le mur sud, s’ouvre la chapelle Saint-Sébastien consacrée le 24 septembre 1509 et insérée dans la base du clocher. Les travées de l’église sont délimitées par les faisceaux de triple colonnettes à chapiteaux feuillagés correspondant aux contreforts extérieurs. Des arcs s’élancent au-dessus des chapiteaux, plaqués contre les murs de la nef, seules traces des voûtes d’ogives qui auraient dû prendre place sur ces chapiteaux. Il est probable que la construction du choeur au début du XIVe siècle a imposé une nouvelle décoration au niveau de la nef.

Les ouvertures s’échelonnent du XIIe au XVIe siècles : baies fermées par des arcs en plein cintre puis par des arcs brisés. La charpente, en chêne, est datée du XIVe siècle. Les chevrons forment les fermes de la charpente.

Le logis des moines

Le bâtiment qui abrite le logis des moines est attenant à l’église, au nord de celle-ci. Édifié au XIIe siècle, il est reconstruit en partie au XIVe siècle et la tour escalier est ajoutée au XVIe siècle. Le premier étage est reconstruit au XVIIIe siècle.

Adossée au bâtiment, une tour octogonale supporte une tourelle en encorbellement. La tour contient un escalier en vis qui se termine sous une voûte gothique octopartite. cette voûte repose sur des corbeaux de pierre sculptés. Les façades de la tour sont percées de fenêtres à meneaux ornées de personnages et d’animaux sculptés. De part et d’autre de la fenêtre inférieure, deux apothicaires sont représentés, l’un avec son mortier, l’autre tenant un sac de simples. Les fenêtres, bouchées au XIXe siècle, sont aujourd’hui rouvertes. Chaque étage est orné d’un cordon de feuilles de vigne et de raisins.

Le logis des moines contient également au rez-de-chaussée la chapelle du prieur, la sacristie, la salle capitulaire et une salle voûtée. Les différentes ouvertures du bâtiment sont encadrées par des moulures et des guirlandes richement sculptées, particulièrement la porte d’entrée, surmontée d’un dais abritant une statue de la vierge.

Le premier étage contient une pièce à boiseries.

Mutations des bâtiments conventuels

Le prieuré de Sainte-Gauburge relève de l’ordre bénédictin, ce que reflète son organisation architecturale : aux bâtiments conventuels répondent les bâtiments agricoles. L’espace de prière, réservé aux moines, s’organise autour du cloître : logis des moines, logis du prieur, église. Un bâtiment aujourd’hui disparu et dont on ne connaît pas l’affectation, fermait cet espace.

Le logis des moines, fortement remanié aux XVIe et XVIIIe siècles, comprend au rez-de-chaussée quatre salles qui peuvent remonter au XIIIe siècle : la chapelle du prieur, l’armarium, la salle capitulaire et le réfectoire. À l’étage se trouvait les appartements du prieur et au dessus, sous les combles, les cellules des moines.

À la fin du XVe et au début du XVIe siècle, de grandes transformations s’opèrent dans le bâti. Le logis des moines se dote d’une tour d’escalier, à la manière des manoirs (Courboyer, la Vove). Le cloître disparaît, remplacé par une simple galerie le long du logis des moines. Le prieur commendataire, Jacques Croquet, réaménage le bâtiment nord pour en faire son logis, désormais connu sous le nom de « logis du prieur ». Ainsi, le système de la Commende se traduit par une sectorisation des bâtiments prieuraux : désormais le prieur possède son propre logis. Cependant, les prieurs n’y résidant qu’occasionnellement, ce logis est occupé par les fermiers généraux, tout du moins le rez-de-chaussée.

Au XVIIIe siècle, le logis des moines est réinvesti par les prieurs. Des travaux sont entrepris au premier étage, rendant plus confortable les anciens appartements. Des baux signalent qu’il restait à l’usage exclusif du prieur : « demeure excepté du présent bail le premier étage de la maison prieurale ». Le bail du 17 octobre 1778 est plus précis encore puisqu’il indique que le prieur se réserve « la chambre de dessus le fournil pour en faire s’il le juge à propos l’auditoire de sa seigneurie ».

Les vestiges les plus anciens du prieuré se trouvent dans l’église, qui était à la fois prieurale et paroissiale. Ils sont datés des XIe-XIIe siècles. En 1509, le clocher est construit, dont la base est occupée par la chapelle Saint-Sébastien.

Un marché passé entre Jacques Abot, prieur, et Michel Biseau, marchand charpentier et couvreur à Saint-Cyr-la-Rosière, le 25 octobre 1731, prévoit entre autres la réfection des toitures de l’église. Les matériaux nécessaires seront fournis par l’artisan, à l’exception de l’ardoise du clocher, dont le prieur se chargera.

Une visite épiscopale du 1er juin 1743, fournit de précieuses indications sur l’édifice. L’évêque de Sées, Louis François Neel de Christot, s’émerveille de ses propositions, mais il constate que la nef « était autrefois voûtée, mais la voûte est tombée, et celle du choeur ne paraît pas trop assurée ». Si l’état d’ensemble de l’église semble à peu près correct (excepté la voûte), la chapelle Saint-Sébastien apparaît en piteux état. L’évêque prend donc la décision suivante : « faute de satisfaire à la présente ordonnance avant prochain, (…) l’église demeurera interdite dans ledit temps ».

Le logis du Prieur

Bâtiment réservé au Prieur comprenant des pièces de vie et une salle de réception et d’apparat. À la Révolution, le Prieuré est acheté et perd l’une de ses fonctions, celle du spirituel, seule perdure la fonction agricole. Néanmoins, cette importante exploitation continue à s’insérer dans le champ économique de la région. Les fermiers installent leur logement dans ce logis, créent des divisions intérieures et transforment le premier étage en grenier à blé.

Les réaménagements et les constructions du XVe et du XVIe siècles

À l’est, la jonction avec le logis des moines est encore visible : portes de communication et souche de cheminée. Cette liaison semble avoir été détruite à la fin du XVIIe siècle. Sur le pignon ouest, deux baies : l’une a été remaniée et l’autre porte extérieurement une grille de protection encadrée par un masque humain et un crapaud.

Au premier étage, au nord, la salle a reçu sur la cheminée et trois de ses murs, un décor peint recouvert d’un badigeon au début du XXe siècle. Cette fresque a secco n’est pas présente sur le mur sud. Une cloison légère (lattage, emplissage de moellons, finition en terre et chaux) isolait cette salle de l’axe de circulation formé par la coursière extérieure.

Ces peintures de la Renaissance sont rares en Normandie. Celles-ci ont été réalisées au début du XVIe siècle (avant 1553, date inscrite sur la cheminée). Par chance, nous avons une description de ce décor par l’abbé Barret en 1900 :

Ce ne sont partout, sur les pans de la cheminée, sur les murs voisins, que feuillages, fleurs et fruits, animaux fantastiques, un pêle-mêle prodigieux de verts et de rouges, avec des têtes de chimères, en noir, qui le long des fenêtres forment une riche bordure… sur les tailloirs des colonnettes courtes qui soutiennent le manteau deux cartouches portant cette date et ces initiales : à droite 1553, F.D. ; à gauche F.C.

Le dessus de la cheminée est porte une inscription en lettres noires sur fond rouge : tota pulchra es Maria et macula non est in te, phrase d’introduction du cantique des cantiques, 4,7 : Tu es toute belle ma bien aimée (et sans tache aucune).

Avec cette troisième cheminée, le programme ornemental devient plus net : une dévotion particulière à la Vierge, figure du Nouveau Testament, pendant de la chute d’Adam et Eve de l’Ancien Testament. Une grande campagne de travaux semble avoir été entreprise à cette époque, englobant successivement la décoration de la chapelle Saint-Sébastien, la tour d’escalier et le logis du Prieur (extérieur et intérieur).

L'église et la chapelle du Prieur

Jusqu’à la Révolution, l’église était à la fois prieurale et paroissiale. Après 1791, elle conserve uniquement sa fonction paroissiale. En 1812, date de son rattachement à la paroisse de Saint-Cyr-la-Rosière, elle est fermée au culte et devient lieu de stockage pour la ferme. En 1972, pour la sauver de la ruine, l’association des Amis du Perche y crée le musée des Arts et Traditions Populaires du Perche, précurseur de l’Écomusée du Perche. Si les collections permanentes ont déménagé dans le musée construit en 1985 (bâtiment en bois), elle demeure un lieu d’expositions temporaires.

L’intérieur de l’église permet de suivre la progression architecturale du XIIe au XVIe siècle :

  1. Nef (XIIe-XIIIe siècle)
  2. Choeur (XIVe-XVe siècle)
  3. Chapelle Saint-Sébastien, base du clocher (1509)
  4. Sacristie
  5. Fonts baptismaux doubles (1583)
  6. Lavabo de la nef
  7. Lavabo du choeur
  8. Lavabo flamboyant de la chapelle Saint-Sébastien
  9. Dalles funéraires
  10. Derrière le sarcophage (provenant de Condé-sur-Huisne), ancienne porte faisant la communication avec les bâtiments monastiques.

Trois autels et leur piscine ou lavabo (vasques aménagées près de l’autel destinées à la purification durant l’office) occupaient l’église. L’autel de la nef a disparu, seul le lavabo qui lui était associé a été conservé.

Chapelle du prieur (XIIIe siècle) : possède une piscine Renaissance et un hagioscope (petite fenêtre sous la voûte, donnant dans la chambre du prieur). Après la Révolution, son abside est remplacée par un mur droit, les deux arcades donnant sur l’église sont murées (l’une d’elles a été rouverte en 2010).

Écomusée du Perche

En 1972, les Amis du Perche et leur président Philippe Siguret ont pesé de tout leur poids pour que se crée le musée des Arts et Traditions populaires du Perche. Ainsi, grâce à l’action de Jean Massiot (fils du fondateur des Amis du Perche) et d’Armand Gouyon, l’église prieurale de Sainte-Gauburge a pu être sauvée de la ruine. Il en fut de même pour les outils de la vie quotidienne du monde rural du Perche, qui sont exposés dans l’église prieurale.

En 1984, le nouveau bâtiment, aménagé par l’architecte Michel Quitté, est inauguré. Il accueille l’exposition permanente. En échange, l’église prieurale accueille les expositions temporaires. En 1985, les Amis du Perche confient la gestion de la structure au Comité départemental de la culture du département de l’Orne. En 1994, le musée est géré directement par le conseil général de l’Orne.

En 2000, le musée des Arts et traditions populaires du Perche prend le nom d’écomusée du Perche.

Informations utiles

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Tel: 02 33 73 48 06

https://www.ecomuseeduperche.fr

Lieu dit Prieuré de, 61130 Saint-Cyr-la-Rosière